Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 3.djvu/266

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
262
REVUE DES DEUX MONDES.

dal pour s’appuyer sur les fondemens de la philosophie moderne.

Le droit de propriété est le résultat naturel de l’intelligence et de la force de l’homme, et toujours il faut ramener comme cause souveraine l’activité humaine. Rien de plus juste sur le droit de propriété que cette pensée de Thucydide : Souvenez-vous que ce ne sont pas les choses qui possèdent les hommes, mais les hommes qui possèdent les choses[1].

La propriété foncière n’est qu’une des innombrables propriétés qu’enfante la force humaine. Ces autres propriétés demandent aujourd’hui à leur sœur aînée non pas le combat, mais le partage. Gardez vos mottes de terre, laboureurs et propriétaires, vos frères n’en sont point jaloux ; ils ne convoitent point vos biens, ils désirent l’habileté de la vie sociale. Pour Dieu ! ni le poète, ni le savant, ni le philosophe, ni le mécanicien, ni le statuaire ne veulent déserter leur cabinet, leur atelier, leur laboratoire où se développent leurs œuvres et leurs idées chéries pour courir enfoncer une charrue dans un chétif morceau de terre : mais ils réclament le droit de cité pour prix de leurs études et de leur génie. Alors l’égalité pleinement satisfaite n’aura plus souci de morceler à l’infini le sol de la patrie ; l’art développera ses procédés toujours plus puissans sur l’étendue de vastes territoires[2], et la France pourra ressembler à un riant et fertile jardin où tous ses enfans auront les fruits de l’égalité, ceux de la terre, et se trouveront heureux tant par les lois que par la nature.

iii.

Tous les principes de l’humanité ont commencé à se développer dans le même point du temps, et depuis ce moment cette simultanéité n’a jamais été brisée.

Dans la vie chasseresse tous les élémens et toutes les notions de

  1. Périclès aux Athéniens.
  2. Le Code civil recommande d’éviter de morceler les héritages et de diviser les exploitations ; art. 832.