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NAPOLÉON.

Ni chaud, ni soif, sous le soleil.
Plus de mille et mille royaumes
Ouvrent leur porte à leurs fantômes…

Il a fait trois pas devant lui ;
Toute la terre a rebondi.
Il fait trois pas pour disparaître ;
La terre pense : C’est mon maître.
Et comme un bœuf sous l’aiguillon,
Muet, retourne à son sillon,
Ainsi le monde, sans rien dire,
Rentre au sillon de son empire.


vii.



Du haut faîte de sa ruine,
Les bras croisés sur sa poitrine,
Il regarde au loin tout le jour
Le monde et le ciel à l’entour.
Et mainte larme de colère
Sous ses pieds a creusé la terre.
— Qu’avez-vous pour pleurer du sang,
Grand empereur, a dit Bertrand ?


— Je pleure, quand je vois, sur le mont qu’elle dore,
Cette étoile où mon nom n’est pas écrit encore.
Je pleure, quand le vent apporte dans les bois
Tout ce bruit qui n’est pas le bruit que fait ma voix ;
Je pleure, quand je compte, au-dessus de ma tête,
Ces mondes où jamais n’a monté ma conquête.

Que la terre m’ennuie en son chétif enclos !
Et que vaut son empire avec tous ses tombeaux ?
Trop vite mon esprit arrive à sa barrière ;
En trois bonds mon cheval va laver sa crinière
Dans chacun de ses flots et les tarit soudain.
L’Elbe est trop près du Nil, le Tage du Jourdain,