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NAPOLÉON.

Les cavaliers couverts d’écume
Sont montés déjà dans la brume.
En s’asseyant, les fantassins
Ont tous pleuré leurs pleurs d’airains :
« Ah ! qu’elle est longue cette route !
« Ah ! qu’elle est haute cette voûte !
« Ah ! que j’ai soif ! ah ! que j’ai faim !
« Grenadier, donnez-moi la main.

« Je suis allé pendant ma vie
« En Allemagne, en Moscovie,
« Jusqu’à Saragosse et Berlin,
« Et sur le perron du Kremlin ;
« J’ai marché long-temps dans la pluie
« Et dans le sable d’Arabie ;
« Et jamais, ou sain ou blessé,
« Le chemin ne m’a tant lassé. »

Mais leur empereur, à leur tête,
Le front levé comme à la fête,
Porte à sa main un vieux lambeau ;
C’est du pont d’Arcole un drapeau ;
Devant les cieux il le déplie,
Comme aux anciens jours d’Italie,
Pour courir d’un pas plus hâté
Sur le pont de l’éternité.

Toute la terre s’est émue ;
Une voix déchire la nue :
« Viens dans mes cieux, sous les autans ;
Je les ai faits partout si grands,
Pour que tu suives leur ornière
Sans jamais trouver de barrière. »


ix.


Et l’on dit qu’une fois, après cette nuit-là,
Un ange tout-puissant que sa gloire voila,