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REVUE DES DEUX MONDES.

§. Ier. — LE PARTI LÉGITIMISTE.

Depuis la révolution de juillet, c’est pour la première fois que nous voyons un parti légitimiste s’avouant dans un pouvoir de l’état. Cela devait ainsi arriver après le mouvement des passions politiques. Les partis s’essaient d’abord dans les rues, dans les conspirations ; puis, quand les tentatives échouent, ils se circonscrivent dans la constitution, agissent dans la liberté qu’elle leur laisse ; ils en usent à leur profit et pour leurs desseins.

Cette première apparition d’une opposition royaliste dans la chambre a été saluée par des excès de joie du parti légitimiste ; c’était chose naturelle. Lorsqu’un parti long-temps en dehors des affaires y trouve sa place, quand il peut envoyer ses hommes d’élite, les suivre à la tribune, proclamer leurs doctrines, propager leurs opinions, c’est pour lui satisfaction et triomphe. Telle a été la condition du parti légitimiste ; il a bruyamment parlé de sa victoire, il a exagéré son succès, groupé dans ses rangs quelques convictions incertaines ; il a pu dire : Je suis une force !

Alors ont commencé les calculs ; bien des illusions ont été amoncelées ; de beaux rêves d’or sont venus égayer la triste condition d’un parti vaincu, il y a quelques années, par une force si bruyante, si populaire. Les calculs ont varié : quelques journaux se sont donné trente, trente-cinq voix ; d’autres, plus exacts, vingt-cinq. Je crois pouvoir affirmer que le parti légitimiste n’ira pas au-delà de ce chiffre en réunissant toutes les nuances.

Ces nuances existent déjà, elles se développeront avec plus de souplesse et d’intensité, à mesure que chacune d’elles recevra par les élections nouvelles les renforts qu’elles ne peuvent manquer d’obtenir. J’en vois quatre déjà, et je me trouverai d’accord sur ce point avec la conscience des hommes habiles du parti.

1o Les jacobites purs sous la direction de MM. Berryer, Hennequin, ne trouvant aucune alliance possible avec la dynastie ; luttant corps à corps avec elle jusqu’à ce que celle-ci succombe, ou que le parti qu’ils représentent soit politiquement anéanti ;

2o Les tories, opinion que M. de Lamartine voudrait créer, et qui n’existe jamais que faiblement dans les premiers temps de révolutions et de passions publiques, où tout marche vers les choses et les hommes absolus. Ce parti grandira sans doute avec le temps, et si la dynastie et l’ordre actuel se maintiennent, il se changera en parti conservateur, en cette aristocratie de pairie et de parlement qui domine la Grande-Bretagne. Mais pour cela il faut du temps, du calme. Jusqu’à cette époque, si M. de