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DE L’INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE EN FRANCE.

plus laconique de l’empire. La république française avait vu la première coalition se dissoudre, et une partie des puissances de l’Europe faire acte de reconnaissance. La fortune britannique maintenait seule une lutte que la présence de Bonaparte en Égypte devait rendre d’autant plus vive, et dans laquelle on vit bientôt rentrer, avec elle, Naples, la Russie et l’Autriche. Les évènemens de cette époque avaient un caractère de grandeur que toutes les merveilles de l’empire n’ont pu faire oublier, et le ministre, par son appel à l’industrie, voulait prouver à l’Europe que cinq années de guerre extérieure, combinées avec les maux de l’anarchie intérieure, n’avaient pas eu le pouvoir de modérer l’élan du génie producteur de la nation française. Le gouvernement décerna des médailles aux fabricans qui lui parurent mériter cette distinction, et annonça le projet de rendre périodiques et annuelles les expositions dont l’essai venait d’être tenté.

Ce n’est cependant qu’après l’avènement au consulat du grand capitaine du siècle, que la seconde exposition eut lieu. Ouverte le 19 septembre 1801, elle fut encore associée aux fêtes de la fondation de la république et concourut heureusement avec la signature des préliminaires de la paix avec l’Angleterre. L’année suivante à la même époque, une troisième exposition devait être la dernière qui fût consacrée au nom de la conquête de la liberté. L’empire était aux portes, avec son cortège de nouvelle noblesse, de princes, de ducs, de maréchaux, de sénateurs et de grands fiefs ; et, quand en septembre 1806 une nouvelle exposition s’ouvrit, depuis deux ans, un ordre de chose tout nouveau régnait sur la France étonnée. Les idées avaient rétrogradé bien au-delà de la célèbre nuit du 4 août 1789, et les médailles décernées par les pairs des concurrens, par des hommes libres et indépendans, ne furent plus le seul mobile qui conduisit les industriels à s’associer au grand inventaire des richesses de la nation.

Il sera difficile aux hommes qui n’en ont pas été témoins, de comprendre l’influence puissante qu’exerçait alors la présence de Napoléon. Ses éclatantes victoires, ses gigantesques travaux, ses fortunes diverses, les entreprises colossales dans lesquelles il avait engagé la France, solidaire désormais de sa réussite, tout en lui agissait sur ceux qui venaient à l’approcher. Heureux qui obtenait un mot, un regard, une approbation ; plus heureux ceux à qui il décernait quelque distinction flatteuse, car à lui moins qu’à tout autre souverain on eût osé proposer de récompenser la médiocrité. Napoléon, préoccupé de certaines fausses opinions pour la grandeur et la prospérité du pays, déçu peut-être par les rêves de son ambition particulière, avait, malheureusement, conçu l’idée que l’industrie peut s’improviser, que ses progrès peuvent se commander, que la répul-