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tress, de préférer votre aristocratie précédente à l’humilité actuelle de ces concessions mitoyennes.

Nous devons à un Anglais, M. Th. Maccree, une histoire de la réforme en Italie[1], pleine de révélations curieuses, savamment recueillies. L’Italie a souffert pour toutes les causes de la liberté moderne sans jamais en jouir pleinement : nation dévouée, elle n’a point gardé le souvenir de son martyre, mais seulement de son honneur. Quand donc pourra-t-elle rassasier sa soif au fleuve dont les eaux la fuient ? Quand donc brisera-t-elle la coupe sanglante où on l’abreuve ? La réforme trouva l’Italie passionnée partout, prête en plusieurs endroits : à Venise, à Ferrare, à Bologne, dans les principautés du nord, la science était trop grande pour que le libre examen ne fût pas accueilli ; dans la Calabre, il y avait les colonies hérétiques des Vaudois ; à Naples, il y avait des vice-rois d’Allemagne qui admiraient Luther par patriotisme. Dans la première moitié du xvie siècle, la révolte s’accrut vite ; après ce terme, la proscription et les bourreaux l’étouffèrent longuement. Le récit des exécutions qui dépeuplèrent la Calabre est d’un effet horrible ; les catholiques se voilaient la face devant ces boucheries papales : à Montalto, le même bourreau coupait avec son couteau la gorge à quatre-vingt-huit luthériens en un jour. Ces atrocités faisaient haïr le froc aux moines eux-mêmes.

Tous les développemens de cette histoire ont été très fidèlement retrouvés par M. Maccree. On pourrait désirer dans son livre des vues plus générales, et un ressouvenir moins mesquin du méthodisme anglican ; mais on ne peut qu’y louer beaucoup la multitude claire des détails. Cet ouvrage doit être cher aux Italiens. C’est l’épopée complète des tortures que la papauté a infligées à leurs pères. Les illustres martyrs de la tyrannie autrichienne, en retrouvant ainsi dans l’histoire la suite non interrompue des aspirations violentes de leur pays à la liberté, doivent puiser dans le récit de ces hécatombes l’assurance de l’avenir.


M. le comte Ferdinand dal Pozzo[2], ancien maître des requêtes, et premier président de la cour impériale de Gênes, a trouvé un excellent moyen pour raffermir les Italiens dans le bonheur du statu quo. Il a prétendu démontrer à ses compatriotes que l’Autriche les gênerait infiniment plus en dehors de leurs frontières qu’au dedans, et que l’esclavage où ils

  1. La Réforme en Italie au xvie siècle, ses progrès et son extinction, par Th. Maccree, traduit de l’anglais ; Paris, chez Cherbuliez.
  2. Della Felicita che gl’ Italiani debbono e possono dal governo austriaco procacciarsi, Paris, Cherbuliez.