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on offrit à M. Molé et au duc de Broglie l’entrée simultanée dans le conseil, l’un comme président sans portefeuille, l’autre comme ministre des affaires étrangères ; on faisait ainsi rentrer deux noms qui pouvaient jeter quelque éclat sur le ministère expirant. Il fut encore répondu qu’il serait pénible, et pour M. Molé, et pour M. de Broglie, d’être dans une dépendance l’un de l’autre, soit pour la présidence du conseil, soit pour le ministère des affaires étrangères ; cette combinaison, faite d’ailleurs sans principes arrêtés, sans programme convenu, ne pouvait avoir une longue durée.

En tout ceci, on voit que le ministère aurait disposé d’abord du portefeuille de M. de Rigny et de M. l’amiral Jacob qui tous deux étaient sacrifiés aux intérêts de leurs collègues sans qu’ils fussent prévenus de rien. On ne parlait pas de M. Persil, ce nom-là n’avait rien de populaire ; il était resté dans son isolement et, j’ose dire, dans son individualisme ; on pouvait le garder ou le sacrifier aux besoins de la position, et faire de son portefeuille un moyen de rapprochement avec le tiers-parti ; il ne se serait agi que de substituer M. Dupin aîné à son ami du barreau. Le ministère de la guerre n’était offert à personne : il avait été fait quelques insinuations, mais indirectes, à M. de Caux ; il eût été peut-être l’homme désigné si la combinaison avait été poussée à sa fin ; M. de Caux avait déjà répondu qu’à 64 ans il avait besoin de repos et ne se croyait pas la faculté nécessaire pour diriger encore une fois un département aussi actif, aussi appliqué que le ministère de la guerre.


Deuxième journée. — Les premières tentatives pour faire entrer au conseil certains hommes politiques ayant échoué, les ministres se trouvèrent donc en présence du roi dans la situation où ils étaient auparavant. Les dissentimens étaient les mêmes. Au milieu des pourparlers qui s’étaient engagés dans les négociations particulières, il avait été mis en avant qu’une démission de tous les ministères faciliterait les arrangemens, et qu’alors on pourrait travailler d’une manière un peu plus large, un peu plus directe, à la recomposition d’un cabinet. Dans cette démission simultanée, chaque nuance ministérielle voyait son intérêt ; elle n’avait rien de sincère ; M. Guizot et M. Thiers savaient bien qu’en travaillant chacun de leur côté à la recomposition d’un ministère, ils en seraient partie intégrante. Une version veut, et ceci je ne puis l’affirmer, qu’à travers leurs colères politiques, M. Thiers et M. Guizot s’étaient promis de se soutenir l’un l’autre, pacte auquel adhérèrent plus tard MM. Humann et de Rigny. On convint donc qu’une démission simultanée serait donnée ; elle fut en effet remise au roi, qui se trouva dès lors sans ministres ; j’en excepte pourtant MM. Jacob et Persil qui, étrangers à ce mouvement et