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s’est donné, surtout quand ce chef vient de passer à une opinion plus nette et mieux dessinée, il faut bien conclure que cette majorité a changé d’avis sur son président, et qu’il faut la consulter de nouveau. Il est impossible que M. Dupin ne fasse pas une piteuse figure en face de la chambre qui vient de lui refuser ce que le président considérait comme une dette ; comment peut-il désormais se dire le directeur suprême des débats, l’homme de confiance de la majorité ? Comment comprend-il le sentiment de ses devoirs et de ses fonctions ? Il fait dire partout qu’il aurait eu mauvaise grâce à quitter la présidence parce qu’on lui refusait 26,000 francs : c’est pitié en vérité de ne pas vouloir comprendre le sens d’un vote aussi significatif ; la chambre n’a pas vu une question d’argent ; elle a donné une leçon ; elle a déclaré à M. Dupin qu’après avoir essayé son ministère, après s’être prononcé dans la question de l’adresse, le président cessait d’avoir sa confiance. À cela, M. Dupin répond encore : « Si l’on procède à un nouveau scrutin, j’aurai la majorité, ce sera donc une pure forme. » Nous doutons d’abord que M. Dupin ait réellement cette majorité dans la position nouvelle qu’il s’est faite ; mais s’il l’avait, ce serait une force donnée à son crédit, un baptême nécessaire, une manière de retremper sa vie politique, et cela ne serait pas inutile à sa considération parlementaire.

Je répète que la seconde querelle devait se vider entre toutes les nuances de l’opposition et le ministère à l’occasion de l’amnistie. Le rapport de M. Dumon a cherché à voiler le côté politique de ce débat ; on dirait que son travail est un simple devis d’architecte, et il n’est pas plus question d’amnistie que si jamais on n’en avait parlé dans la chambre. Je crois qu’en face d’un parlement c’est se mal placer que de jeter un voile officieux sur des questions qu’il est pourtant impossible d’éviter ; la chambre ne demandait pas des plans et des devis à M. Dumon, pas plus qu’à M. Thiers qui les fait distribuer ; ce n’était pas une affaire des salons de M. Decazes qu’il fallait traiter, mais une des grandes difficultés du moment. M. Dumon a-t-il cru l’éviter en faisant de la phrase architecturale, en badigeonnant un discours, en accablant le sentiment politique sous la pierre, le plâtre et le mortier ?

La discussion qui s’est ouverte doit être envisagée sous deux points de vue : 1o comme œuvre de tactique des différentes nuances de l’opposition ; 2o comme une lice ouverte où tous les talens de la chambre se sont proclamés.

Sous le premier point de vue, il y a eu dans cette discussion un pas immense de fait, à savoir la fusion complète de la fraction indépendante du tiers-parti dans la nuance Odilon Barrot. Ce tiers-parti flottait jusque-