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REVUE. — CHRONIQUE.

ger, se chargera de régler cette affaire en même temps que quelques intérêts particuliers qui se rattachent au paiement des 25,000,000, et réparera ainsi la dernière faute de M. de Broglie, car c’est encore à l’inhabile M. de Broglie que le ministère doit ce nouvel embarras.

M. de Rigny, qui pèche par excès d’habileté au contraire, avait cependant soigneusement préparé le terrain à M. le duc de Broglie. La veille du jour où les amendemens devaient être discutés, il se rendit auprès du général Valazé, lui prouva le plus ingénieusement du monde que son amendement n’était qu’un double emploi de celui de M. Leyraud, qui demandait aussi une réparation à l’Amérique, et obtint de l’honorable député la promesse de laisser confondre les deux amendemens en un seul. Une démarche près de M. Leyraud eut pour résultat une seconde correction. On promit à ce dernier de donner toujours, à la chambre, dès qu’elle le demanderait, communication de la correspondance du ministère avec le président des États-Unis ; cette promesse fut faite en présence de plusieurs députés. Cela fait, on convint avec les députés ministériels de faire passer l’amendement Valazé, devenu par la concession du général, le moins explicite des deux, et de laisser M. Leyraud s’endormir sur les promesses ministérielles. Malheureusement M. de Broglie entama gauchement la question, et s’embrouilla dans les deux amendemens. Les centres déroutés prirent l’un pour l’autre, et votèrent par méprise. Il en résulta une confusion qui dure encore, et que faute de mieux le ministère voudrait augmenter maintenant, s’il est possible. M. de Rigny, voulant réparer, autant qu’il est en lui, la maladresse du président du conseil, s’est chargé de l’exposé des motifs à la chambre des pairs, où il est venu dire, il y a deux jours, que le gouvernement avait écarté, par un noble sentiment de dignité, un amendement qui tendait à soumettre les explications de Jackson à une publicité officielle. Qu’on juge de l’humeur de M. Leyraud à qui la promesse de la publicité officielle avait été faite devant ses collègues. Sans une officieuse intervention, ses dénégations eussent été vives ; il s’est borné, comme on l’a vu, à protester contre l’exposé des motifs de M. de Rigny, et M. de Broglie s’est trouvé forcé de déclarer qu’il y avait eu méprise. M. de Broglie, qui se vantait, en entrant dans ce ministère, d’en sortir sans aucune altération, et qui voulait, disait-il, imiter le Rhône dont les eaux ne se mêlent pas à celles du lac de Genève qu’elles traversent, M. de Broglie verra encore plus d’une fois sa loyauté mise à de rudes épreuves.

Le ministère avait encore attaché son existence à la question des fonds secrets ; en d’autres termes, il lui fallait 1,200,000 francs à gaspiller sans contrôle, pour vivre. Puisqu’il ne s’agit que de cette bagatelle, le minis-