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voit au premier coup d’œil combien sont considérables les acquisitions faites par la science dans ces parages.

En 1817 et dans les années précédentes, les mers polaires avaient été remarquablement dégagées de glaces ; le moment paraissait venu de résoudre enfin le problème si long-temps agité. C’est à M. Scoresby, l’un des marins les mieux au fait de tout ce qui concerne les régions arctiques, qu’est dû l’honneur d’avoir réveillé à ce sujet l’attention du gouvernement anglais. Secondé par le célèbre sir Joseph Banks, il réussit à déterminer l’amirauté à tenter de nouveau l’entreprise. Deux bâtimens, l’Isabelle et l’Alexandre, furent aussitôt armés et mis sous les ordres du capitaine Ross, l’auteur de la nouvelle relation. Le lieutenant, depuis capitaine Parry, lui fut donné pour second, et nommé commandant de l’Alexandre. L’expédition fit voile le 18 avril, entra dans le détroit de Davis et longea la côte occidentale du Groenland jusqu’au fond de la mer de Baffin, non sans avoir eu à lutter sans cesse contre les glaces et le mauvais temps. En revenant au sud, le long de la côte opposée, elle se trouva tout à coup par le travers d’une ouverture d’environ quinze lieues de large, que bordaient de chaque côté des terres élevées fuyant à l’ouest : c’était le détroit de Lancastre, déjà aperçu par Baffin, qui, ainsi que nous l’avons dit, l’avait pris pour une baie sans issue. Les navires y entrèrent le 20 août ; mais à peine avaient-ils fait dix lieues dans l’intérieur, qu’ils découvrirent, à une distance d’environ huit lieues, des glaces qui s’étendaient d’un bord du détroit à l’autre et paraissaient le barrer complètement. Rien n’est plus fréquent dans ces parages que de prendre les glaces pour des terres et réciproquement ; le capitaine Ross commit malheureusement cette erreur, et donna l’ordre de virer immédiatement de bord. Il donna, sur la carte qui accompagne la relation de ce premier voyage, le nom de Montagnes de Crooker à ces terres imaginaires. Le résultat de cette expédition excita un profond mécontentement en Angleterre. Plus d’un bruit injurieux pour la réputation maritime du capitaine courut dans le public, et il fut l’objet de vives attaques, les unes avouées, les autres anonymes. On sent qu’il ne nous appartient pas même d’émettre une opinion dans une affaire aussi délicate. Les lords de l’amirauté, juges suprêmes dans ces sortes de matières, approuvèrent d’ailleurs la conduite du capitaine, et peu de temps après son retour il fut promu à un grade plus élevé.

Une nouvelle expédition fut organisée sur-le-champ ; deux nouveaux bâtimens, l’Hécla et le Griper, furent mis sous le commandement du lieutenant Parry, qui mit à la voile le 5 mai 1819. À la fin de juillet, il arriva à l’entrée du détroit de Lancastre, qu’il avait pour mission principale d’ex-