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LA COMÉDIE AU IVe SIÈCLE.

bien défendu d’admettre dans la communion chrétienne les mimes, les conducteurs de chars et tous les gens attachés aux jeux de la scène : saint Cyprien, Tertullien, tous les Pères, avaient tonné contre les boucheries de l’amphithéâtre et la luxure de l’orchestre ; mais il n’y avait pas eu jusque-là de plaintes portées à l’autorité civile, ni de demandes faites à l’empereur de supprimer ces restes de gentilité. Gratien obtempéra en partie aux instances de l’église : il défendit de célébrer aucun spectacle les jours de Noël, de l’Épiphanie, de Pâques, de la Pentecôte, le dimanche, les fêtes des apôtres, ni pendant tout le temps que les nouveaux baptisés portaient les habits blancs. Valentinien, qui, dans sa jeunesse, avait aimé passionnément les jeux du cirque, revint plus tard à des sentimens tellement chrétiens, qu’il ne pensait pas (ainsi nous l’apprend saint Ambroise dans son discours sur la mort de ce prince) que l’on dût célébrer les jeux, même aux fêtes destinées à solenniser la naissance de l’empereur.

Sous Théodose, il y eut une sorte de redoublement dans l’amour des peuples pour les folies du cirque et du théâtre. À cette époque où le christianisme s’était recruté de toute cette masse indifférente qui suit l’impulsion du pouvoir, il y eut une sorte de relâchement dans la discipline et dans les mœurs. Cependant Théodose maintint l’interdiction des jeux le dimanche et essaya même par plusieurs lois de refréner la fureur des spectacles, particulièrement dans les magistrats qui négligeaient les affaires pour capter une popularité plus facile au moyen des jeux et des fêtes[1].

Cet engouement général qui entraînait les chrétiens eux-mêmes sur les gradins des amphithéâtres, ranima un moment les espérances du parti païen. Non-seulement il y eut relâchement chez les fidèles, mais il y eut parmi les gentils des tentatives plus hardies de retour au paganisme. Sans les talens admirables, sans le zèle apostolique des grands docteurs du ive siècle, il y aurait eu péril pour la foi naissante. Nous voyons alors Libanius et un certain nombre de païens distingués par leur talens, se coaliser pour faire triompher cette réaction. Nous voyons Symmaque, devenu préfet et consul de Rome en 391, faire les derniers

  1. Cod. Theodos., lib. i, tit. vii, lix. 2 ; et ibid., lib. xv, tit. v, lix. 2.