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DÉBATS SUR LE CHRISTIANISME.

christianisme. Ce livre n’est pas ordinaire ; et dans sa structure anarchique, il réclame l’attention de ceux qui se livrent à l’étude de la religion chrétienne. Il n’est pas facile de démêler le but de l’auteur, car s’il a une immense lecture, il possède peu de jugement ; il n’est pas doué du sens critique des choses humaines.

M. Reghellini ne s’est pas fait une idée juste et grande de la place qu’occupe la religion dans les conceptions et les destinées de l’homme ; il semble, à le lire, que la religion dans son essence, et puis tel ou tel culte, aurait pu être, comme n’être pas. On ne voit pas non plus s’il estime que l’établissement du christianisme ait été un bien et un progrès pour le monde ; la grandeur de la loi mosaïque n’est pas relevée par sa plume ; et dans le dédale des faits qu’il accumule, le fil fatal qui doit vous conduire dans l’histoire de l’humanité se rompt à chaque pas.

Nous avons aussi un reproche grave à ne pas épargner à l’auteur ; il a méconnu la sainteté du fondateur du christianisme, et sans appuyer davantage sur ce point, il n’a pas compris que la chasteté a été l’arme de Jésus-Christ, comme la licence des mœurs celle de César et d’Alexandre.

Mais, au milieu de l’érudition confuse de M. Reghellini, on distingue avec un peu d’effort et d’étude quelle était, dans les premiers temps où la doctrine du Christ parut, l’état de la société et du monde. Les formes de la démocratie antique étaient brisées ; le sentiment de l’humanité s’élevait avec peine, mais avec une succession lente qui ne pouvait rétrograder ; on pensait à la liberté, non plus du citoyen, mais de l’homme ; on voulait la revendiquer et l’étendre en la revendiquant. Aussi les tribuns ne manquaient pas dans les rangs du temple, et les libérateurs se produisaient. Le théâtre de ces apparitions fut surtout la Judée et l’Égypte, terres où pouvaient se rencontrer les traditions de l’Orient et les disciplines de l’Occident. Et puis les imaginations s’ébranlaient ; elles rêvaient une autre société, d’autres combinaisons et d’autres arrangemens dans la vie : on se proposait la communauté des biens, et même, il faut le dire, la communauté des femmes.

Sur la communauté des femmes dans les six premiers siècles de l’ère chrétienne, M. Reghellini a été infatigable dans ses recherches. C’est à regret, écrit l’auteur, que nous disons que,