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véritable frégate que l’habitation de Schotel. Cette singularité me frappa lorsque j’allai le visiter. On entendait distinctement les voix des marins du dehors et le commandement des patrons qui appareillaient ou jetaient l’ancre sous les croisées. Schotel travaillait au milieu de tout ce bruit, la pipe à la bouche et un bonnet de laine sur la tête. Il n’avait qu’à jeter un coup d’œil à travers les vitres pour donner à ses flots la physionomie que la nature leur prêtait en cet instant. Schotel connaît parfaitement la mer, et il ne l’affuble pas de ces incidens impossibles dont beaucoup de peintres de marines l’enrichissent si volontiers. Elle lui semble assez bien partagée de ses propres qualités. Les mouvemens de ses navires sont surtout bien en harmonie avec les eaux qui les soutiennent. On pourrait peut-être demander à sa couleur plus de tons chauds et vigoureux, quoiqu’il ait pour excuse la nature spéciale de son pays pendant sept mois de l’année. En effet, les mers du nord ne présentent, pendant cet espace de temps, que de larges nappes grises ou d’un blanc sale, rayées çà et là de bandes blanches, quand le vent les fait moutonner. Le ciel lui-même prend de cette teinte brumeuse, et le soleil pâle et défait semble mourir à l’horizon. Voilà ce dont il faut se convaincre avant de condamner cette couleur en dernier ressort. On pourrait cependant conseiller à l’artiste de nous donner de préférence quelques études des mers de juillet et d’août, s’il est jaloux de populariser sa réputation dans nos climats plus tempérés. Quoi qu’il advienne, le nom de Schotel s’inscrira glorieusement dans les fastes de sa ville natale, qui a déjà fourni quatre artistes de renom à La Hollande, Ferdinand Bol, l’un des meilleurs élèves de Rubens, Samuel Van Hoogstraeten et Nicolas Maas, disciples de Rembrandt, et enfin Camille Bisschop, élève de Bol, et qui peignait avec un rare talent des figures et des sujets sur bois, pour la décoration des riches appartemens.

Le genre historique paraît avoir peu d’attraits pour les peintres de l’école hollandaise contemporaine. Parmi ceux qui l’exploitent, je ne trouve à citer avantageusement que Eeckout[1]. Eeckout continue l’école de Rembrandt. Il a fait une étude spéciale des œuvres de ce brillant maître. On remarque aussi à La Haye, dans

  1. Prononcez Yékâoute.