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REVUE DES DEUX MONDES.

L’une avait la couronne et l’autre la tiare ;
Mais pour l’homme profond qui médite et sépare
Le travail des humains de l’œuvre du soleil,
Et voyant une reine en son grand appareil,
Reconnaît, aux lueurs de sa robe empourprée,
Si c’est la main de l’homme ou Dieu qui l’a sacrée.
Il était, ô lecteur ! bien facile de voir
Que les manteaux flottans de ces reines du soir
Avaient été plongés avec persévérance
Dans la cuve d’airain de l’humaine science,
Où toute chose perd son beau lustre natal,
Et que les cent fleurons de leur bandeau royal,
Les perles, les rubis, les vertes émeraudes,
Sous la vive morsure et les étreintes chaudes,
Et les ardens baisers de la lime de fer,
Avaient pu, pour un temps, gagner un teint plus clair,
Et s’enrichir aussi de belles ciselures,
Au point de mieux parer les blondes chevelures
De ces reines du champ, mais pour l’éternité
Perdu la sainte flamme et la fécondité.


La Marguerite du poète
N’a pas de couronne à sa tête ;
Tout au plus si les jours de fête
Elle met un épi de blé.
Elle va seule par la ville,
Porte au puits sa cruche d’argile,
Rentre à la maison, coud et file,
Et chante le roi de Thulé.
Mais vous, vous avez dès l’aurore
Trouvé, tout en venant d’éclore,
La couronne en votre berceau.
Vous êtes faites à la gloire :
Ce n’est pas vous que la mémoire
De l’écrin trouvé dans l’armoire
Éveille la nuit en sursaut.