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révolution, serait le seul salut de la pairie ; les whigs fort embarrassés au fond de leurs semblans d’opinions populaires, qu’il s’agit aujourd’hui de prouver par des actes et non plus par des proclamations.

Numériquement ces deux nuances sont loin d’être de force égale. Si vous comptiez les consciences, vous auriez dix tories contre un whig. Pourtant, en 1832, la minorité whig a fait capituler les tories ; depuis, forte de l’appui du dehors, elle leur a plus d’une fois encore dicté la loi. Mais le moment approche où la vraie majorité va peut-être essayer de secouer le joug, elle sent que les concessions ne peuvent plus rien pour la sauver. Que n’estime-t-elle, pour son honneur, qu’il est tout aussi romain de prendre son épée et de tomber en défendant son rempart, que d’attendre la mort politique paisiblement assis sur sa chaise curule !

Les règlemens et les habitudes des deux chambres ont leurs analogies et leurs dissemblances.

Chez les lords, c’est le même usage qu’aux communes de siéger sans façon le chapeau sur la tête ; ce n’est pas tout-à-fait le même abandon, il y a plus de tenue. Il est plus rare de voir leurs seigneuries se faire un lit d’une banquette, et figurer avec leurs jambes les signes du télégraphe. Les bruits de l’assemblée sont plus contenus, plus civilisés, les improbations plus courtoises ; le drame des débats offre en général moins de grandes scènes animées et saisissantes : il y a plus de concision et d’unité. Ce n’est pas cette lutte de médiocrités verbeuses qui pousse constamment à bout la patience et la politesse de la seconde chambre. Là, pour une harangue éloquente, vous en subirez souvent dix maussades, qui ne font qu’allonger et noyer la discussion. Ici, les habiles discoureurs ne sont pas si nombreux, et on n’abuse pas autant de la parole : on va plus volontiers au fait. Il est vrai que la pairie n’est qu’un groupe, une petite garnison retranchée. Ne demandez ni la réserve, ni la discrétion, ni la discipline, à une multitude comme les communes ; armée impatiente qui bivouaque les nuits entières sur les bancs, et dont chaque soldat veut être un conquérant.

§ ii.

Si haut placé que soit le président des lords, surtout lorsqu’il est grand-chancelier de l’Angleterre, il n’a point, comme speaker, l’autorité souveraine de celui de l’autre chambre. Ce n’est pas à lui que les pairs s’adressent quand ils parlent, c’est à l’assemblée ; ce n’est pas