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l’œil de tigre apprivoisé, qui s’agite, qui se penche, qui s’empresse, qui joue et bondit sur son banc : c’est l’évêque d’Exeter, l’un des robustes piliers de l’église fanatique militante. Celui-là, c’est un ennemi plus adroit et plus dangereux de la liberté ; ses mauvais instincts s’enveloppent de toute la séduction des dehors aimables. Nul parmi nos nobles hypocrites spirituels n’a, comme lui, la politesse exquise et l’insinuation câline des manières. Il n’y a point de chat qui dérobe mieux ses griffes sous le velours de sa patte.

Il ne semble pas que l’évêque d’Exeter ait la repartie aussi prompte que l’attaque ; ou plutôt c’est que la réplique n’entre guère dans le plan de ses hostilités doucereuses. Écoutez-le, voici qu’il se lève saintement, son petit bonnet noir carré entre ses mains jointes ; il a sa besace pleine de dénonciations, il faut bien qu’il la vide. Sans doute il lui en coûte, à lui homme de paix, d’avoir à guerroyer contre le pouvoir temporel ! Mais pourquoi le pouvoir temporel prend-il ces libertés de vouloir rogner l’embonpoint du pouvoir spirituel ? Oh ! le prélat charitable, écoutez-le ! Comme sa perfidie a le sourire sur les lèvres ! comme il égratigne candidement ! On ne provoque pas avec plus d’onction et de timidité. Qui est-ce qui aurait cette modestie craintive à jeter un sujet de discorde au milieu d’une assemblée ? À présent qu’on l’a ramassé, c’est bien, il ne lui reste plus rien à dire. Whigs et tories, déchirez-vous, le bon évêque ne vous interrompra pas, il a fait son devoir de pasteur protestant. Déchirez-vous. Il s’est assis et regarde la mêlée ; tout aise et tranquillisé, il rit humblement sous cape en comptant les coups qu’on porte au ministère. Dieu lui pardonne ! je crois que son pied bat la mesure !

Si je vous décrivais les trente évêques protestans entassés là, je vous en montrerais trois ou quatre à peu près whigs qui ressemblent peut-être mieux à des chrétiens, et parmi eux principalement le frère de lord Grey, le chef de cette imperceptible minorité spirituelle ; mais c’est assez de cet échantillon de surplis. Laissons à notre droite les archevêques. Le premier banc que nous rencontrons après le leur, si nous allons vers la barre de la chambre, c’est celui des ministres. Ici nous ferons une pause.

Arrêtons-nous devant cet homme en chapeau gris, en redingote brune, nonchalamment appuyé sur sa canne. La chaleur est extrême. Afin d’être plus à l’aise, il a sans façon retiré sa cravate. Que si vous le rencontriez dans St-James-Park, son lieu de promenade favori, caracolant à cheval, ou bien allant de pied, sa large narine ouverte au vent, la tête levée, l’œil étincelant et dédaigneux : à sa haute taille, à