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TALLEMANT DES RÉAUX.

suivre cette carrière. « Je haïssais ce métier-là, dit-il, outre que je n’étais pas assez riche pour jeter quarante mille écus dans l’eau. »

Le père de Tallemant des Réaux jouissait d’une fortune considérable ; il avait une maison opulente ; il nous semble inutile de s’arrêter long-temps à le défendre d’un reproche dirigé contre lui par Charpentier, et répété par Furetière. Le traducteur de la Cyropédie, emporté par un mouvement de colère, injuria l’abbé Tallemant en pleine Académie, jusqu’à lui dire qu’il était le fils d’un banqueroutier de La Rochelle. On sait trop à quelles injustices la passion peut entraîner les hommes, et ici toutes les apparences sont favorables aux Tallemant. Mais si Pierre jouissait des avantages de la fortune, il était peu disposé à y faire participer ses fils de son vivant ; aussi des Réaux chercha-t-il dans une alliance avantageuse les moyens de sortir d’une dépendance qui lui pesait, et il demanda la main d’Élisabeth de Rambouillet, sa cousine germaine. Elle était fille de Nicolas de Rambouillet, frère de sa mère.

Élisabeth de Rambouillet n’ayant encore que onze ans et demi quand elle fut demandée par son cousin, le mariage fut convenu, mais la célébration différée pendant deux ans.

Par cet établissement, Tallemant, se voyant appelé à une belle existence dans le monde, renonça à prendre un état qui l’eût privé de sa liberté ; on voit seulement, par une quittance de l’année 1675, entièrement écrite et signée de sa main, que Tallemant des Réaux a exercé la charge de contrôleur provincial ancien des régimens, au département de la Basse-Bretagne.

Son mariage dut encore resserrer les liens de parenté qui l’unissaient à Antoine de Rambouillet de La Sablière, poète agréable, auteur de madrigaux fins et délicats, dont la femme, Marguerite Hessein[1], a été l’amie et le soutien de La Fontaine.

Libre de soins et d’affaires, Tallemant des Réaux se livra à la

  1. M. Walkemaer a douté que le véritable nom de madame de La Sablière fût Hessein ou Hesselin (Histoire de la vie et des ouvrages de Jean de La Fontaine). Ce doute doit cesser devant les recherches faites dans les généalogies de cette famille conservées dans le cabinet du roi.