Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 3.djvu/731

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
723
TALLEMANT DES RÉAUX.

d’anecdotes sur les règnes de Henri iv et de Louis xiii ; il voyait cette femme si justement célèbre, alliée des deux reines Catherine et Marie de Médicis, entourée de sa noble famille, de ces d’Angennes de tout point si remarquables, visitée par Mme la Princesse, par Mlle de Bourbon, depuis duchesse de Longueville, et par le héros de Rocroy ; il y rencontrait la duchesse d’Aiguillon, la vicomtesse d’Auchy, Mme de Sablé, Mlle de Scudéry, Mme de Sévigné, Voiture et Mlle Paulet, cette lionne indomptée, Vaugelas, Malherbe, Racan, les deux Corneille, Mairet, Benserade, Chapelain, Godeau, Huet, Ménage, Gombaud ; enfin toutes les illustrations comme toutes les célébrités étaient là réunies ; il y recueillait ce qu’il a raconté du cardinal de Richelieu, des Guise et des Valançay, de Boisrobert, de Ninon, de Marion de Lorme, etc.[1]. De ce cercle brillant, mélange de grandeur et de préciosité, Tallemant descendait à celui des financiers et de la haute bourgeoisie ; fils d’un homme de finances, marié à Élisabeth de Rambouillet, fille d’un riche traitant, cousin-germain par alliance de la fille de Montauron, ce Crésus à la mode auquel Corneille dédiait Cinna, introduit, par le mariage de son frère aîné avec Mlle de La Honville, au milieu d’un autre cercle opulent, il lui a été facile d’observer de ces différens points de vue la cour et la ville, la noblesse et la bourgeoisie. Bourgeois lui-même, et peut-être jaloux des avantages que donnait une naissance que le mérite n’accompagne pas toujours, des Réaux ne put se défendre de mêler à ses observations le dénigrement et la malignité, et il mit une sorte de complaisance à signaler les vices des grands et à les rabaisser au niveau des autres hommes ; le même motif le conduisit à s’étendre sur des familles obscures, et à révéler l’origine de gens partis de bas, que la fortune avait favorisés ; jeune, porté à

  1. On trouve de grands détails sur la société de l’hôtel de Rambouillet dans un Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France, par M. Rœderer, de l’académie des sciences morales. Paris, Firmin Didot, 1835, in-8. Nous regrettons que cet ouvrage ait été composé avant la publication des Mémoires de Tallemant ; l’auteur y aurait pu trouver d’utiles renseignemens. Nous regrettons aussi de n’avoir pu profiter des vastes recherches contenues dans cet ouvrage pour éclaircir quelques passages de Tallemant.