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REVUE. — CHRONIQUE.

tion de l’école normale, avec six mille francs d’appointemens. Cette place est peut-être la douzième dont jouit M. Cousin.

Toute la société parisienne a été cruellement frappée de la mort de Vicenzo Bellini, ce bon et aimable jeune homme venu il y a si peu de temps parmi nous, et qui était déjà notre frère à tous et notre ami. Bellini avait vingt-neuf ans ! Il avait déjà fait Il Pirata, la Somnambule, I Capuletti ed i Montecchi, I Puritani, et cet admirable opéra de la Norma qui a excité tant d’enthousiasme en Italie, et que nous entendrons cet hiver. On ne pouvait voir Bellini sans l’aimer, on ne pouvait entendre sa musique sans l’aimer plus encore ; car il mettait dans ses compositions toute son ame et sa sensibilité. Il faut avoir entendu Bellini exprimer ses idées sur la musique, et avoir vu toute la joie que lui faisait éprouver la pensée de composer un opéra français, pour bien sentir la perte cruelle que les arts ont faite.


— Sous le titre d’Analyse critique et littéraire du Roman de Garin-le-Lohérain[1], M. Leroux de Lincy vient de produire des vues ingénieuses et instructives sur l’origine et la composition des romans de chevalerie, et en particulier sur ceux auxquels on a appliqué la dénomination de Chanson de Geste. C’est principalement aux plus anciens des romans du cycle de Charlemagne que l’auteur rattache ce nom ; il pense que dans cette branche de romans surtout ont dû s’introduire, à travers les amplifications littéraires dont les trouvères les ont déguisés et affaiblis, quelques-uns des anciens chants primitifs, familiers aux guerriers germains, les derniers échos de ces cantilènes héroïques et populaires que Charlemagne lui-même, au dire d’Eginhart, eut soin de faire recueillir. M. de Lincy essaie de retrouver dans la prose latine du moine de Saint-Gall, qui écrivait sous Charles-le-Chauve, des morceaux de chants populaires, et le dialogue qu’il cite entre le paladin Oger et le roi Didier semble bien justifier cette opinion par le caractère de sauvage et barbare beauté qui y règne. L’analyse que fait M. de Lincy du poème de Garin unit l’exactitude à l’intérêt ; il y rend pleine justice à l’excellente publication de M. Paris.

— Il se publie en ce moment plusieurs traductions des œuvres de lord Byron ; après en avoir tant parlé sans le lire, il est juste qu’on le lise un peu plus, aujourd’hui qu’on le cite un peu moins. Bien des aperçus faux et des idées exagérées se dissiperont devant un examen plus sérieux du poète. Il y a deux parts dans la vie de lord Byron : ses commencemens pleins de faste, d’orgueil, de colère, d’emportemens contre le

  1. Librairie de Techener, place du Louvre, 12.