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DES PARTIS ET DES ÉCOLES POLITIQUES.

gés augmente les chances de l’anarchie plutôt qu’elle n’en donne au prince dont le nom est inscrit sur leurs bannières ; guerre d’armées qui fut d’abord une guerre de bandes ?

On a trop oublié qu’aucun parti n’a jamais terminé une guerre civile en Espagne : elle y renaît du sang versé, remontant sur ses montagnes blessée, mais jamais morte. Mina n’a jamais eu raison de Merino, ni Merino de Mina. Un régime exceptionnel et protecteur établi sous notre influence dans les provinces basques et dans la Navarre occupées militairement ; une flotte anglaise pour recueillir les chefs, en attendant le jour prochain d’une amnistie garantie par notre parole ; des régimens français devant lesquels un prince, alors sans espérances sérieuses, se fût retiré avec honneur, et auxquels les Navarrais auraient remis leur épée plutôt qu’à des ennemis implacables pour avoir été si souvent vaincus : telle était, il y a quelques mois, la voie la plus simple pour éviter des complications qu’il n’eût pas fallu, ce semble, une haute perspicacité pour pressentir. Ainsi l’on restait dans des conditions moins incertaines et moins alarmantes, et la France continuait ce rôle de modération énergique qui a fait sa force et son honneur.

L’intervention opérée dans des circonstances différentes eût trouvé appui moral au sein de l’opinion qui aujourd’hui la repousse ; en s’y associant par des voies patentes et honorables, le gouvernement anglais se fût élevé au-dessus du triste rôle que ses enrôlés de tavernes lui font jouer ; sous le rapport de nos finances, la dépense de l’occupation n’eût peut-être guère excédé celle qu’une observation longue et armée va rendre nécessaire ; le Nord aurait fini par subir la royauté constitutionnelle d’Isabelle, comme la France et l’Angleterre subissent l’anéantissement politique de la Pologne. Don Carlos, roi problématique et nomade, n’eût pas fait ce que n’a pu le roi Guillaume, à la tête d’une armée victorieuse.

Celui qui écrit ces lignes est loin du théâtre des évènemens, loin en ce moment de Paris où ils aboutissent ; il n’en sait que ce que les journaux apprennent à tous ; mais il suffit de ne pas ignorer l’influence que la situation politique de l’Espagne doit exercer sur la nôtre, et l’importance plus grande encore dont sera l’alliance espagnole, alors que la France, sortie de la réserve que les temps lui imposent, suivra au dehors l’élan de sa politique naturelle, pour comprendre qu’en abandonnant au hasard des évènemens l’issue d’une telle lutte, on a laissé à la fortune ce que la prudence commandait de lui ôter.

Dans d’aussi graves circonstances, on peut croire que Casimir Périer ne se fût pas contenté d’agir par la voie diplomatique, il eût probable-