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par les armes ; mais le roi est plus blessé que personne de ces rassemblemens, et, à en croire l’historien, il n’est d’efforts qu’il ne fasse pour les détruire. Tous ceux qui se partagent le pouvoir sont droits, honnêtes et de bonne foi ; le pouvoir est une purification pour ceux qui le tiennent, la justification suffisante de leurs actes et de leurs pensées ; les coupables, les traîtres, les criminels, en ce moment, ce sont les émigrés qui ne tiennent compte des injonctions du pouvoir royal qu’ils reconnaissent encore, et les écrivains fougueux qui figurèrent depuis dans la convention, et que nous verrons absous à leur tour quand le pouvoir leur écherra.

Bientôt le parti vraiment démocratique commence à poindre. On voit paraître aux Jacobins et aux Cordeliers les terribles têtes de Robespierre et de Danton ; et l’on sent déjà leur influence au ton cavalier que prend M. Thiers en parlant des girondins. Encore une fois, on cherche où est le mal, où est le crime, où est le génie funeste qui appelle sur la France tant de calamités, où sont les furieux qui frappent le trône, qui détruisent tous les liens, où sont les égoïstes qui excitent le peuple à demander ses droits et un sort qu’ils ne veulent pas lui donner ? Lafayette est pur et sans tache, tout le monde le sait ! Roland est un homme droit, austère, mené par sa femme, il est vrai ; mais Mme Roland est une âme si belle ! Dumouriez sauverait le trône au péril de sa vie, et la patrie est son Dieu ! Qui donc trouble tout ? Est-ce Pétion ? Pétion est un honnête homme, un homme sensé ; ses ennemis ont pris pour de la stupidité une apparence de froideur et de calme, et ses détracteurs eux-mêmes n’ont jamais attaqué sa probité. C’est donc Santerre ? Mais M. Thiers ne trouve pas un mot de blâme pour Santerre. Danton ? Danton avait des passions violentes et une audace extraordinaire, mais il était généreux. Robespierre n’était encore que peu de chose, et Marat n’était rien. Cependant la France était soulevée, le roi en fuite et en déchéance, tous les intérêts ruinés, l’ennemi aux portes, et dans la capitale, on montait à l’assaut du château royal, on assassinait ses défenseurs, et on portait des têtes humaines au bout des piques ! À voir toutes ces choses, il est bien évident qu’il se commettait çà et là quelques petites fautes de conscience ; mais vous en chercheriez vainement les traces dans l’histoire de M. Thiers qui se borne à dire : Hélas ! pour-