Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/81

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
DIPLOMATES EUROPÉENS.

tactique, l’Autriche, de puissance secondaire et auxiliaire qu’elle était, devenait puissance prépondérante ; quel que fût le côté vers lequel elle pencherait, elle avait droit d’exiger, comme indemnité, des avantages positifs. C’était un immense service rendu à la maison d’Autriche que ce changement de position ? Pour satisfaire le parti anglais, M. de Metternich envoyait à Londres un de ses conseillers intimes, le baron de Weissemberg, sous le prétexte officiel d’amener la pacification générale, mais avec le but secret de pressentir le cabinet de Londres sur les avantages qu’il pourrait faire à l’Autriche en subsides et en territoire, au cas où celle-ci se prononcerait formellement pour la coalition.

L’armée française, miraculeusement reconstituée, s’était portée sur l’Elbe. Les merveilles de Lutzen et de Bautzen avaient trouvé l’Autriche l’arme au bras, non point encore prête, mais attendant quelques mois pour prendre part aux évènemens qui se préparaient. C’était derrière les montagnes de la Bohême que se masquaient près de deux cent mille Autrichiens. M. de Metternich donnait donc à sa monarchie l’attitude d’une médiation armée, et ce fut en cette qualité qu’il prépara l’armistice de Plesswitz, définitivement réglé à Newmarck. L’Autriche déclarait toujours que « le conflit armé embrassant quatre cents lieues de ses frontières, il était impossible qu’elle restât plus long-temps sans se dessiner, sans entrer comme partie active dans le combat, si les belligérans ne se rapprochaient pas les uns des autres. »

L’Autriche, se posant ainsi comme médiatrice armée, serait-elle acceptée par les belligérans ? La Russie et la Prusse ne faisaient aucune objection, car elles avaient trop d’intérêts à ménager une puissance qui pouvait amener en ligne deux cent mille hommes de bonnes troupes. Après quelques observations aigres et peu mesurées, Napoléon accepta également cette médiation. D’abord une difficulté de formes se présenta ; et la forme cachait ici, il faut le croire, une difficulté de fond. Il s’agissait de savoir si dans les négociations qui allaient s’ouvrir, les plénipotentiaires s’aboucheraient directement les uns avec les autres, ou bien si l’on suivrait les formes écrites du congrès de Teschem, c’est-à-dire, si les belligérans remettraient chacun au médiateur des mémoires sur leurs prétentions réciproques, mémoires qui seraient communiqués par ce médiateur à chacune des puissances en litige. On voit par là le grand rôle que M. de Metternich avait créé à l’Autriche. En s’abouchant les uns avec les autres, les plénipotentiaires pouvaient traiter en dehors des intérêts autrichiens ; au contraire, en suivant les formes de la convention de Teschem, l’Autriche