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rière des débats politiques s’est rouverte ; des journaux ont pris part du dehors aux discussions parlementaires ; l’opinion publique a pu refaire un apprentissage. Tout cela n’est encore sans doute qu’à l’état rudimentaire ; mais tout cela existe, et il faut accepter ces premières et timides conquêtes comme le prélude et le présage de conquêtes plus audacieuses, plus décisives. C’est donc comme mesure transitoire et relative que le statut a quelque valeur ; considéré en lui-même, il n’en peut avoir aucune, car il ne relève d’aucun principe et n’en proclame aucun. Nous ne nous y arrêterons pas plus long-temps.

Avant de passer outre, rappelons, ne fût-ce que comme éphémérides, que le mois de mars avait été marqué par deux évènemens graves : d’abord une troisième amnistie avait été publiée, mais pas encore absolue ; le tour de Mina et de ses compagnons de 1830 ne vint qu’au mois de mai suivant. Le second fait est la création de la milice urbaine ; une insurrection carliste avait éclaté le 4 à Madrid ; quoique réprimée sans peine, elle fit sentir la nécessité d’armer la portion libérale de la population, afin de l’opposer à l’autre aux jours de crise. L’enrôlement d’abord était volontaire, on le rendit obligatoire par une loi calquée sur la loi française. Mais à peine formée, cette milice nationale devint un objet d’épouvante pour M. Martinez ; et durant le cours de son ministère, il s’étudia à l’entraver dans tous ses mouvemens.

Le même mois qui vit naître le statut royal, vit éclore aussi l’œuf si long-temps couvé de la quadruple alliance ; le dernier échange de signatures est du 22 avril. À cette époque, la France et l’Angleterre étaient seules représentées à Madrid, parce que, seules des grandes puissances, elles avaient reconnu la petite reine Isabelle. L’Autriche, la Russie, la Prusse, Naples même, malgré les liens du sang, avaient rappelé dès l’année précédente leurs ministres et leurs ambassadeurs. Ces quatre cours n’avaient et n’ont encore que des chargés de la correspondance ; quelques-uns de ces agens avaient eu la prétention, pour le moins inconvenante, de se faire centre de sottes intrigues carlistes, et en cela ils avaient été cordialement assistés par leurs confrères de La Haye et de Turin, dont les sympathies ne pouvaient manquer d’être acquises à la cause du prétendant. C’était mal user du privilége d’inviolabilité que le droit des