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ration du parlement, en qui résidait alors le pouvoir, et qui était d’ailleurs aigri par les mauvais traitemens que ses envoyés avaient reçus dans les Provinces-Unies. Il fut donc porté un bill, mis en vigueur au 1er décembre 1651, qui, sous des stipulations générales, était entièrement dirigé contre la nation hollandaise. Là se trouve la première édition du fameux Acte de navigation, qui, après bientôt deux siècles, est encore la règle du commerce anglais. Ce bill amena, entre les deux puissances, une guerre qui dura jusqu’en avril 1654. Cromwell, devenu protecteur, termina les hostilités par un traité qui, en faisant cesser les autres causes de mésintelligence, ne stipula cependant aucune dérogation à l’acte de navigation.

Cet acte, renouvelé et confirmé sous Charles II en 1660, a été regardé, par la plupart des écrivains, comme la cause de l’accroissement de la puissance anglaise. Sans entrer ici dans la discussion du mérite de cette opinion, qui exigerait une étude spéciale, nous nous bornerons à en citer les dispositions principales. Aux navires anglais seuls était réservé le droit d’importer, en Angleterre, les denrées ou marchandises du crû d’Asie, d’Afrique ou d’Amérique, et des établissemens anglais dans ces trois parties du monde. Quant aux articles d’Europe, ils ne pouvaient arriver que sur des navires anglais ou sur des navires du pays de production et qui y auraient été construits.

L’acte de navigation assura à la métropole le commerce exclusif de ses nouvelles colonies ; mais l’Angleterre, en même temps attentive à ne pas contrarier ces établissemens dans le développement de leurs productions, prohiba dès 1652 la culture du tabac, qui s’était répandue dans plusieurs comtés d’Angleterre, et qui y réussissait. Les doubles motifs de l’acte sont la conservation des droits d’entrée, et d’un autre côté l’obligation de ne pas nuire aux planteurs de la Virginie. Cromwell, en 1654, nomma des commissaires pour veiller à l’exécution stricte de cet acte, qui, sous Charles II en 1660, fut confirmé et appuyé de peines sévères. Si dès-lors la Grande-Bretagne entrait dans le système prohibitif, elle ne se laissait cependant pas emporter à l’injustice envers ses colons, par la considération des intérêts intérieurs.

En France, les ordonnances de prohibition de trafic aux colonies françaises, des 25 novembre 1634 et 12 février 1635, ne s’adressaient qu’aux sujets nationaux disposés à violer le privilége accordé aux compagnies à qui avaient été concédés ces établissemens. Plus tard, le 10 septembre 1668, il fut ordonné que le commerce des îles ne serait fait que par la compagnie des Indes occidentales, ou par les bâtimens français avec la permission de cette compagnie. Le 10 juin 1670, il fut défendu aux navires étrangers d’aborder dans ces colonies ; le 18 juillet 1671, il fut inter-