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LA BELGIQUE.

1o  Le droit public qu’elles consacrent ;

2o  Les formes du gouvernement qu’elles établissent ;

3o  Le régime local, que des mesures plus récentes ont complété.

Les lois conçues au sein d’une révolution, et après une longue résistance à des tentatives d’arbitraire, sont toujours palpitantes des passions du moment, et semblent dirigées contre le passé, beaucoup plus qu’elles ne sont propres à garantir l’avenir. Alors les principes dont il a été fait abus sont solennellement révoqués, les intérêts menacés sont rassurés par des dispositions largement protectrices, dont le moindre inconvénient est d’être inutiles du moment où la position est changée. On se défend contre un ennemi qui n’est plus ; sans se mettre en garde contre l’ennemi nouveau auquel il va falloir faire face. La Belgique venait de se soulever contre les tentatives de la maison de Nassau ; elle avait combattu long-temps pour la liberté de sa foi, de sa pensée et même de sa langue aussi s’attacha-t-elle à donner à ces grands intérêts des garanties fort convenables sans doute sous le roi Guillaume, mais qui perdaient une grande partie de leur importance sous un gouvernement national. La liberté des cultes, et de l’enseignement surtout, fut assise sur des bases tellement hardies et tellement nouvelles dans le droit constitutionnel, que la position du gouvernement belge est, sous ce rapport, unique en Europe.

« La liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toutes matières, sont garanties.

« Nul ne peut être contraint de concourir d’une manière quelconque aux actes et cérémonies d’un culte, ni d’en observer les jours de repos.

« L’état n’a le droit d’intervenir ni dans la nomination, ni dans l’installation des ministres d’un culte quelconque, ni de défendre à ceux-ci de correspondre avec leurs supérieurs, et de publier leurs actes, sauf, en ce dernier cas, la responsabilité ordinaire en matière de presse et de publication.

« L’enseignement est libre ; toute mesure préventive est interdite ; la répression des délits n’est réglée que par la loi[1]. »

Ainsi s’exprime la constitution ; ainsi sont résumées les idées dont l’union catholico-libérale avait amené le triomphe.

On comprend que les Irlandais catholiques, soumis au régime anglican, réclament tout cela ; rien ne serait plus naturel que d’entendre les malheureux Polonais, si leurs plaintes pouvaient trouver quelque organe et quelque écho, exiger des garanties analogues pour leur foi corrompue dans son enseignement, pour leur clergé menacé dans sa hiérarchie et son indépendance. Mais une position défensive peut-elle se changer en

  1. Constitution belge, art. 14-17.