Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 7.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
IL NE FAUT JURER DE RIEN.

VALENTIN.

Venez toujours, nous nous déciderons.

(Ils sortent.)



Scène II.

Le Salon.
LA BARONNE et L’ABBÉ, devant une table de jeu préparée.
LA BARONNE.

Vous direz ce que vous voudrez, c’est désolant de jouer avec un mort. Je déteste la campagne à cause de cela.

L’ABBÉ.

Mais où est donc M. Van Buck ? est-ce qu’il n’est pas encore descendu ?

LA BARONNE.

Je l’ai vu tout à l’heure dans le parc avec ce monsieur de la chaise, qui, par parenthèse, n’est guère poli de ne pas vouloir nous rester à dîner.

L’ABBÉ.

S’il a des affaires pressées…

LA BARONNE.

Bah ! des affaires, tout le monde en a. La belle excuse ! Si on ne pensait jamais qu’aux affaires, on ne serait jamais à rien. Tenez, l’abbé, jouons au piquet ; je me sens d’une humeur massacrante.

L’ABBÉ, mêlant les cartes.

Il est certain que les jeunes gens du jour ne se piquent pas d’être polis.

LA BARONNE.

Polis ! je crois bien. Est-ce qu’ils s’en doutent ? Et qu’est-ce que c’est que d’être poli ? Mon cocher est poli. De mon temps, l’abbé, on était galant.

L’ABBÉ.

C’était le bon, madame la baronne, et plût au ciel que j’y fusse né !

LA BARONNE.

J’aurais voulu voir que mon frère, qui était à Monsieur, tombât de carrosse à la porte d’un château, et qu’on l’y eût gardé à coucher. Il aurait plutôt perdu sa fortune que de refuser de faire un quatrième. Tenez, ne parlons plus de ces choses-là. C’est à vous de prendre ; vous n’en laissez pas ?

L’ABBÉ.

Je n’ai pas un as ; voilà M. Van Buck.

(Entre Van Buck.)
LA BARONNE.

Continuons ; c’est à vous de parler.