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fensif et qu’il les ménageait tous. Mais ils se redressèrent les uns contre les autres. Depuis le triomphe de Jefferson sur le premier Adams, il n’avait plus été question du parti fédéraliste qu’à de rares intervalles. Sous M. Monroë, il se forma de nouveau deux partis parfaitement distincts le parti démocratique qui voulait resserrer les limites de l’autorité fédérale, et le parti national républicain qui interprétait la constitution dans le sens le plus favorable à cette autorité. Ce dernier parti avait deux objets spéciaux en vue : il voulait exécuter, aux frais de la fédération, de grands travaux de communication intérieure (internal improvement), dont le besoin était vivement senti, et protéger par un tarif (american system) les manufactures nationales encore dans l’enfance. Le Nord, en général, était, du moins au commencement, pour l’internal improvement et l’american system ; le Sud, la Virginie en tête, se prononça contre. M. Clay était le grand promoteur de l’une et de l’autre idée ; M. John Quincy Adams les soutenait de son éloquence et de l’influence que lui assuraient de longs services ; les hommes les plus capables du pays étaient du même côté. Il fallait à l’opinion opposée un autre chef que M. Monroë, un homme plus résolu et plus énergique, plus disposé à se montrer homme de parti. M. Monroë approchant de la fin de sa présidence, il fallait aux adversaires des travaux publics et des manufactures un candidat à la suprême magistrature ; ils jetèrent les yeux sur le général Jackson.

L’élection du général Jackson à la présidence devait nécessairement rompre toutes les règles posées par ses prédécesseurs. Il était évident pour les gens de sens rassis, pour les amis de l’ordre légal, pour quiconque tenait aux traditions léguées par Washington, que ce serait un changement radical de système. Sa candidature fut vivement combattue d’abord par tous les hommes sages. Beaucoup de citoyens recommandables revinrent cependant à lui, après réflexion, parce qu’ils crurent avoir trouvé l’homme dont la popularité ferait triompher leur opinion. Ils se flattaient qu’une fois élu, il se laisserait diriger par eux. Ils lui mirent entre les mains un drapeau sur lequel étaient inscrits les principes des droits des états (states’ rights) et le rétrécissement de la prérogative fédérale : No internal improvement ! no tariff ! Il l’accepta, surtout par la raison qu’il voyait dans les rangs opposés des hommes qui lui étaient antipathiques, ceux qui, au sein