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LITTÉRATURE ORIENTALE.

monde, d’autres civilisations ; et il n’y aurait pas besoin d’évoquer de si grands objets. Il suffirait de vouloir faire l’histoire de ce qui sert à notre nourriture, à notre habillement, à nos plaisirs. La pêche, la noix, le thé, le café, le coton, la soie, les perles, les parfums, les échecs, les cartes, le verre, nous viennent de la Perse, de l’Inde, de l’Arabie, de la Chine, de la Phénicie. Ainsi, les détails de la vie commune, aussi bien que les plus hautes explorations de la pensée, nous ramènent à l’Orient.

En outre, les études orientales ont en ce moment un charme particulier. Il en est d’elles comme il en était au XVe siècle de l’étude de l’antiquité. Chaque jour on fait un pas de plus dans une région inconnue qui découvre par degré ses perspectives attrayantes par leur immensité même. En fouillant le vieux sol de l’Orient, chaque jour on découvre un précieux débris du passé. De séculaires ténèbres embrassent encore toute la contrée. Seulement on voit s’avancer çà et là quelques hardis investigateurs, et les flambeaux qu’ils portent se mouvoir de loin dans la nuit. Quelques reflets de ces lueurs aventureuses et isolées éclairent un point, puis un autre, et ainsi le jour se fait peu à peu au sein de cette obscurité. Mais, surtout, pour le haut Orient, ce n’est encore que l’aube d’un jour que nous ne verrons point, heureux si nous parvenons à découvrir et à indiquer de quel côté naîtra l’aurore.

Ce qui est à craindre, c’est qu’en posant le pied dans cette région encore presque inconnue, on n’éprouve une sorte de vertige et d’éblouissement, et qu’au lieu de prendre, pour y pénétrer, la grande route de l’étude, on ne s’y élance de plein saut par un bond de l’imagination. On a déjà fait en Allemagne plus d’un système sur l’Inde, la Chine, la Perse, et les monumens capitaux de la littérature de ces trois pays ne sont pas encore traduits complètement. Quelques-uns ne sont pas imprimés ; quelques-uns même n’existent pas en Europe. Il est donc besoin de beaucoup de patience et de lenteur. Il faut prendre les choses où elles en sont, pour les faire avancer véritablement.

Les travaux de M. E. Burnouf auxquels cet article est consacré, offrent une preuve éclatante des avantages de la méthode que je recommande ici. Si nous savons un jour quelque chose de précis sur Zoroastre, nous le devrons au soin scrupuleux qu’a apporté M. Burnouf à se rendre compte par une analyse approfondie de