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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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14 mai 1837.



Les questions avancent rapidement, non pas avec les hommes qui parlent, mais avec ceux qui agissent. Tandis que M. Guizot faisait, à la tribune, d’admirables distinctions entre l’aristocratie et la démocratie, le ministère accordait l’amnistie et ouvrait l’église Saint-Germain-l’Auxerrois. M. Guizot et ses amis diront sans doute encore que c’est là de la faiblesse ; nous pensons, au contraire, qu’il y a de la force à s’élever ainsi au-dessus des partis.

Le parti doctrinaire repoussait l’amnistie en principe. Dans ses jours de clémence, il consentait à accorder quelques graces individuelles à l’occasion du mariage de M. le duc d’Orléans, mais à condition que les condamnés demanderaient leur grace, en faisant amende honorable. C’était mettre la rigueur dans le pardon même. Le ministère actuel a répondu à ces vaines frayeurs par une amnistie complète, car l’amnistie n’excepte que les contumaces, qui ont, en effet, le droit d’être jugés, droit qu’on ne saurait leur enlever s’ils le réclament, et qui seront naturellement appelés à participer au bénéfice de l’amnistie, quand ils auront déféré à la citation du tribunal où ils étaient appelés. Voilà pour l’acte en lui-même ; quant aux circonstances qui l’ont accompagné, elles ne parlent pas moins haut. Le secret de l’amnistie a été gardé pendant toute la journée du dimanche où eut lieu la revue de la garde nationale. Par l’effet d’une pensée haute et noble, d’un sentiment vraiment royal, le roi s’était opposé à ce que l’amnistie fût proclamée en présence de la garde nationale rassemblée ; le roi craignait qu’on ne supposât qu’il quêtait l’enthousiasme dont il a recueilli ce jour-là les témoignages sans condition. Pendant la discussion au sujet de l’allocation des fonds secrets, pas un seul mot relatif à l’amnistie n’a été prononcé par les ministres, et cependant l’am-