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DE L’INVENTION DE VARRON.

cessoire qui l’intéressait peu ; il pense au sujet même du livre, c’est-à-dire à la Biographie des grands hommes ; dans sa pensée, la finale graphie du mot composé s’applique à un écrit, non à une collection de peintures.

La preuve que l’on fondait sur ce mot péplographie, comme désignant la peinture sur toile, tombe avec cette interprétation que repousse l’usage de la langue grecque.

Ce qui n’y est pas moins contraire, c’est le sens attribué, par M. Quatremère de Quincy, au mot Ἡρακλείδειον, qu’il traduit par ouvrage herculéen, lequel serait encore, à son avis, la collection de portraits, travail immense, travail d’Hercule ; et l’on doit convenir que l’épithète d’herculéen viendrait là bien à propos pour donner quelque consistance aux hypothèses qui précèdent ; mais elle s’évanouit comme le reste. Il suffit de remarquer que herculéen, se disait en grec Ἡράκλειος, non Ἡρακλείδειος adjectif nécessairement dérivé de Ἡρακλείδης, Héraclide ; aussi l’opinion de tous les commentateurs de Cicéron[1], qui ont vu là un livre composé par Varron, dans le goût d’Héraclide le Pontique, est-elle indubitable.

Toutes les preuves, ou du moins toutes les inductions sur lesquelles l’ingénieux antiquaire a fondé son hypothèse, se trouvent donc détruites les unes après les autres. Varron n’a point inventé de procédé particulier pour multiplier les dessins par l’impression en couleur ; la Cyzicénienne Lala n’a point dessiné les portraits de son iconographie ; et ces portraits n’étaient imprimés ni sur toile, ni d’aucune autre manière. Ce qui reste à Varron, c’est l’idée seule de placer des portraits, soit en tête d’un livre, soit dans le corps d’un ouvrage biographique, en regard de la notice sur chaque homme illustre ; idée qui eut pour résultat de populariser les traits des grands hommes, puisqu’elle répandait leur image en même temps que leurs écrits ou ceux de leurs biographes. Elle ne pouvait se perdre ni être abandonnée. En effet, elle continua, par la suite, d’être mise en œuvre. De là, l’épigramme de Martial sur un portrait de Virgile, peint sur parchemin au premier feuillet du recueil de ses poésies.

  1. Ernesti, Lex. Cicer., pag. 562. Il fallait écrire Ἡρακλείδειον, et non Ἡρακλείδιον.