Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 11.djvu/306

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
302
REVUE DES DEUX MONDES.

Tous ceux qui habitaient Paris à cette époque, ont mémoire de son convoi, qui balança celui de Bessières.

Les choses ont bien changé, et de grands revers ont suivi ce triomphe, alors unanime, d’un nom poétique qui du moins vivra. Quant à nous, de bonne heure adversaires, et qui pourtant le comprenons, sur la tombe de ce talent brillant et spirituel que nous ne croyons pas avoir insulté ni dénigré aujourd’hui, près de l’autel renversé de ce poète qui régna et que nous venons de juger sans colère, en présence de celui qui règne après lui, et dont la faveur, si l’on veut, a aussi quelques illusions, en face de cet autre qui ne règne ni ne se soumet, mais qui combat toujours, et nous souvenant de plusieurs encore que nous ne nommons pas, il nous semble hardiment que nous pouvons redire : « Non, dans la tentative qui s’est émue depuis lui, non, nous tous, nous n’avons pas tout-à-fait erré. La poésie était morte en esprit, perdue dans le délayage et les fadeurs : nous l’avons sentie, nous l’avons relevée, les uns beaucoup, les autres moins, et si peu que ce soit dans nos œuvres, mais haut dans nos cœurs ; et l’Art véritable, le grand Art, du moins en image et en culte, a été ressaisi et continué ! »


Sainte-Beuve.