Il fit quelques pas vers la porte, et allait sortir en effet, quand la marquise, qui tournait le dos, et apparemment n’avait pas entendu sa réponse, lui dit :
— Donnez-moi une boîte qui est sur la cheminée.
Il obéit ; elle prit des épingles dans la boîte, et rajusta sa coiffure.
— À propos, dit-elle, et ce portrait que vous aviez fait ?
— Je ne sais où il est, répondit Valentin ; mais je le retrouverai, et si vous permettez, je vous le donnerai, lorsque je l’aurai retouché.
Un domestique vint, apportant une lettre à laquelle il fallait une réponse. La marquise se mit à écrire ; Valentin se leva et entra dans le jardin. En passant près du pavillon, il vit que la porte en était ouverte ; la femme de chambre qu’il avait rencontrée en arrivant, y essuyait les meubles ; il entra, curieux d’examiner de près ce mystérieux boudoir qu’on disait délaissé. En le voyant, la servante se mit à rire avec cet air de protection que prend tout laquais après une confidence. C’était une fille jeune et assez jolie ; il s’approcha d’elle délibérément, et se jeta sur un fauteuil.
— Est-ce que votre maîtresse ne vient pas quelquefois ici ? demanda-t-il d’un air distrait.
La soubrette semblait hésiter à répondre ; elle continuait à ranger ; en passant devant la chaise longue de forme moderne dont je vous ai, je crois, parlé, elle dit à demi-voix :
— Voilà le fauteuil de madame.
— Et pourquoi, reprit Valentin, madame dit-elle qu’elle ne vient jamais ?
— Monsieur, répondit la servante, c’est que l’ancien marquis, ne vous déplaise, a fait des siennes dans ce pavillon. Il a mauvais renom dans le quartier ; quand on y entend du tapage, on dit : C’est le pavillon de Parnes ; et voilà pourquoi madame s’en défend.
— Et qu’y vient faire madame ? demanda encore Valentin.
Pour toute réponse, la soubrette haussa légèrement les épaules, comme pour dire : Pas grand mal.
Valentin regarda par la fenêtre si la marquise écrivait encore. Il avait mis, tout en causant, la main dans la poche de son gilet ; le hasard voulut que dans ce moment il fût dans la veine dorée ; un caprice de curiosité lui passa par la tête ; il tira un double louis neuf qui reluisait merveilleusement au soleil, et dit à la soubrette :
— Cachez-moi ici.
D’après ce qui s’était passé, la soubrette croyait que Valentin n’était pas mal vu de sa maîtresse. Pour entrer d’autorité chez une