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DES ÉTUDES HISTORIQUES DANS LE NORD.

aussi des nouvelles et des romans. Après avoir passé plusieurs années à Drontheim, il revint à Copenhague, et sa maison fut ouverte à tous les hommes qui s’occupaient d’études. Il était grand et généreux. Il secourait avec joie ceux qui avaient besoin de lui, et il aidait de tout son crédit, de tout son pouvoir, les entreprises littéraires qui lui semblaient utiles. Il avait une magnifique bibliothèque qu’il abandonna au public. Son bibliothécaire était mieux payé que ceux du roi, et il le choisissait parmi les hommes les plus instruits. Thorkelin, Sandvig, Nyerup, ont tour à tour rempli ces fonctions. Il entretenait au dehors de vastes correspondances. Les savans aimaient à lui faire hommage de leurs œuvres, et il était le premier à qui les libraires vinssent offrir un livre rare, un manuscrit précieux. Il publia à ses frais les annales d’Abulfeda et plusieurs sagas. La mort de son fils unique lui donna plus de liberté encore dans ses dépenses. Quand il se vit sans héritier, il ne craignit pas d’altérer sa fortune, et il augmenta chaque jour sa collection de livres. Vers la fin de sa vie, cette collection s’élevait à cent mille volumes, et il la céda à la bibliothèque royale. Il menait ainsi une vie splendide, une vie de savant et une vie de prince, entouré chaque jour des écrivains les plus renommés, des étrangers les plus illustres, et travaillant sans cesse.

Ce fut après avoir travaillé avec tant d’ardeur et pendant tant d’années qu’il écrivit son Histoire de Danemark en quatorze volumes in-4o. Mais il y a, dans ce vaste ouvrage, plus de savoir que de critique. Il a entassé l’un sur l’autre tous les faits qu’il avait recueillis, toutes les traditions qu’il avait étudiées, sans oser prendre parti pour l’une ou pour l’autre, sans en rejeter, et par conséquent sans en adopter aucune. Il avait un respect profond pour l’œuvre du passé, pour le fait traditionnel, pour la fable populaire, pour le chant du poète. Il a rassemblé avec un soin religieux tous ces débris d’antiquité, toutes ces feuilles sibylliques dispersées à travers les siècles ; mais quand le moment est venu de faire un choix, il n’en a pas eu la force, et il a tout gardé. Son livre n’est donc pas, à proprement parler, une histoire, mais c’est un riche assemblage de matériaux historiques, une source abondante, où les historiens futurs pourront aller puiser. Tout cet ouvrage respire d’ailleurs une douce et aimable philosophie, un amour profond de l’humanité, et une bonté, une sincérité de cœur, qui font aimer celui qui l’a écrit.

Le mouvement historique du xviiie siècle, mouvement d’érudition et de critique, a été continué par le xixe. Plus que jamais on s’attache à la recherche des faits, à la publication textuelle des documens. Une seule tentative a été faite dans les dernières années pour écrire une nouvelle histoire de Danemark, mais elle a complètement échoué. Maintenant M. Petersen entreprend la même œuvre. C’est un homme doué d’un savoir étendu et d’un véritable esprit de critique. Il a fait une longue étude des antiquités septentrionales, et il est en état de donner à ses compatriotes une histoire de l’époque païenne plus exacte que celles qu’ils ont eues jusqu’à présent. Un autre écrivain, qui