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possession de sa souveraineté : il avait pour princes des enfans de sa patrie. Cruelle déception ! Les six années de leur règne furent honteuses et misérables : formés à l’école empoisonnée des Fanariotes, ils crurent ne pouvoir mieux faire que de suivre servilement leurs traces. En 1828, leur règne cesse : la rupture éclate entre la cour de Russie et la Porte Ottomane ; les deux provinces sont occupées de nouveau. Nous laissons de côté le traité d’Akermann, destiné seulement à préparer la guerre. Après ce traité, M. de Ribeaupierre se rendit à Constantinople en qualité de ministre de la Russie près de la cour ottomane ; des ingénieurs russes, chargés de lever en secret les plans pour la campagne future, accompagnent l’ambassadeur, tant on prévoit que la Turquie, en dépit du traité, violera ses engagemens, et qu’il faudra lui déclarer la guerre.

Le traité d’Andrinople est signé. Quelle que soit l’intention secrète et l’arrière-pensée qui se cachent derrière cet acte, avouons qu’il a commencé pour la Valachie et la Moldavie une ère toute nouvelle, et que les deux principautés lui doivent des résultats singulièrement avantageux.

La réintégration pleine et entière du territoire moldovalaque, le rasement des forteresses de Braïla, Giurgevo et Tourno, la restitution des propriétés environnantes, la fixation du Talveg au milieu du Danube, et le droit accordé au pays de jouir de la moitié du chenal de ce fleuve, par conséquent d’y pêcher, d’y naviguer, d’y bâtir des ports ; la suppression des tributs en nature exigés par la Porte ; le prince devenu souverain à vie ; l’établissement d’une ligne de quarantaine sur la rive gauche du Danube, don inappréciable pour un pays éternellement exposé au plus grand des fléaux, à la peste qui désolera toujours la Turquie et qui bravera la prétendue civilisation inoculée par le sultan Mahmoud ; le droit de se donner une constitution nouvelle, celui d’organiser une milice nationale et d’avoir enfin un drapeau ; voilà les priviléges dont le traité d’Andrinople a doté les provinces.

C’était faire un grand pas aussi que de les laisser maîtresses de créer leur propre constitution. Cette constitution, dont les bases furent jetées au sein du cabinet de Saint-Pétersbourg, fut élaborée dans le pays par une assemblée extraordinaire convoquée ad hoc. Se douterait-on que la Valachie posséda une Constituante ? Au lieu de Sieyes et de Mirabeau, là se montrent deux grosses