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LE MYSORE.

gracieux. Au premier étage, on peut admirer une fort jolie salle de réception, communiquant avec des boudoirs placés aux angles de l’édifice, et d’où l’on monte à une grande terrasse. Le paysage est magnifique : des arbres touffus, des bassins enduits de ciment et destinés autrefois à recevoir les eaux, et deux petits temples élégans, ornent les jardins. On m’a dit qu’après le sac de Seringapatam, cette délicieuse demeure servit quelque temps de quartier-général au colonel du trente-troisième régiment, aujourd’hui duc de Wellington, alors commandant-gouverneur de Mysore.

Le Cavéri, après avoir serpenté dans la vallée en courant du nord au sud, réunit toutes ses eaux pour se présenter de front contre la ville, et au pied même de ses murs se partage de nouveau en deux branches, qui forment une île longue et étroite. Deux collines s’élèvent à chaque extrémité ; la première de ces collines est occupée par la ville de Seringapatam ; à trois quarts de lieue au-delà, sur la pente méridionale de la seconde, qui est beaucoup moins élevée, on aperçoit une ville ouverte, toute indienne, appelée Ganjam par les habitans, jadis florissante et maintenant encore pourvue de quelque commerce. Les Anglais y ont établi des dépôts d’invalides et de grands magasins. L’île est sillonnée de larges et belles routes ; après les avoir suivies pour traverser Ganjam, je m’arrêtai à la pointe-sud, où j’allai visiter Hall-Bag (joli jardin).

Un arc-de-triomphe annonce dignement l’entrée ; une large avenue vous conduit directement par une pente douce et insensible au mausolée de Hyder-Aly et de Tippoo. Le temple est de forme ronde, surmonté du dôme ou bonnet musulman, et isolé sur une plate-forme qui le sépare d’autres édifices servant de mosquées et de caravansérail. Trois belles portes, travaillées et sculptées en bronze, s’ouvrent sur l’intérieur du mausolée, et la rotonde, parfaitement ornée, laisse voir trois tombes couvertes de velours rouge, celles de Hyder, de son fils d’un côté, et de sa femme de l’autre ; au-dessus de ces tombes sont suspendus par des cordons de soie et symétriquement placés de gros œufs d’autruche. Les jardins qui entourent le monument sont vastes et bien entretenus ; à l’entrée, au milieu d’une petite place, s’élève un obélisque peu gracieux. Il a été assez récemment taillé et dressé par les procédés indiens, mais son granit fort grossier et ses formes mal arrêtées ne méritent point l’attention. Derrière l’obélisque, on trouve une espèce de portique ou de chapelle monumentale, dont l’inscription, en marbre noir, rappelle le nom d’un colonel anglais, mort, je crois, dans les cachots du sultan.

Revenant sur mes pas, et me dirigeant vers l’autre extrémité de l’île, j’entrai dans Seringapatam. Un silence de mort règne aujourd’hui dans son enceinte dévastée. Je considérai à loisir ses fortifications qui n’avaient