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LAZARE.

Sans lutte ardente et sans nouveau combat
Des antiques jours se détache,
Et d’un bras fort, dans l’arbre de l’état
Plante elle-même un coup de hache.

Ô William Pitt, ô nocher souverain,
Ô pilote à la forte tête !
Il est bien vrai que ton cornet d’airain
Domina toujours la tempête ;
Qu’inébranlable et ferme au gouvernail
Comme un Neptune tu sus faire,
Devant ta voix, tomber le sourd travail
De la grande onde populaire.
Mais quatorze ans, l’âge au plus d’un oiseau,
De ton pouvoir fut l’étendue,
Et ton bras mort, le fleuve de nouveau
Reprit sa course suspendue.
Ah ! le fou rire a dû prendre à l’enfer
Au bruit de tes gestes sublimes ;
Car pour un temps si court, ô cœur de fer !
Fallait-il donc tant de victimes ?
Fallait-il donc faire pleuvoir le sang
Comme la nue au ciel éclate,
Et revêtir la terre et l’Océan
D’un large manteau d’écarlate ?