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ILLUSTRATIONS SCIENTIFIQUES.

que tu cherches s’élèverait, quand bien même elle n’existerait pas, du fond des eaux à ta rencontre ; car la nature est d’intelligence avec le génie. » Il y a là, sous la forme d’une grande image et d’une splendide exagération, l’expression d’une des conditions les plus réelles du vrai génie dans les sciences, à qui les découvertes n’arrivent point par un hasard, mais qui va au-devant d’elles par une sorte de pressentiment.

Il ne faut pas oublier de noter ici avec quelle adresse ingénieuse M. Ampère sut exprimer le mouvement de l’aiguille aimantée soumise à l’influence d’un courant électrique. Comme ce mouvement change suivant que le courant est placé au-dessus, au-dessous, à droite, à gauche de l’aiguille, rien n’est plus malaisé que d’énoncer, avec clarté et en peu de mots, la direction que l’aiguille prendra dans un cas donné. Par une supposition, bizarre si l’on veut, mais qui remplit merveilleusement son objet, M. Ampère a levé toutes les difficultés que l’on avait à exprimer les diverses relations du courant et de l’aiguille : il s’est montré, on peut le dire, aussi ingénieux dans cet artifice que dans la manière de préparer ses expériences. Il faut se représenter le courant électrique comme un homme qui a des pieds et une tête, une droite et une gauche ; il faut, en outre, admettre que l’électricité va des pieds, qui sont du côté du pôle zinc, à la tête, qui est du côté du pôle cuivre, et que cet homme a toujours la face tournée vers le milieu de l’aiguille. Cela étant ainsi conçu, le pôle austral de la boussole, c’est-à-dire celui qui regarde le nord, est toujours dirigé à la gauche de la figure d’homme que l’on suppose dans le courant. Rien de plus facile alors que de déterminer, pour chaque position du courant, la position correspondante de l’aiguille et de l’exprimer brièvement et clairement. C’est à M. Ampère qu’on le doit.

Ces expériences que je viens d’énumérer, et bien d’autres moins importantes que fit M. Ampère, je les ai exposées comme s’il les avait instituées pour examiner les phénomènes qui devaient se produire. Mais, dans la vérité, elles dérivaient pour lui d’une conception plus haute, d’une formule plus précise, d’une loi enfin qu’il avait trouvée et qui contenait, dans leurs détails les plus minutieux, tous les phénomènes de l’électro-magnétisme. Au point de vue où il se place, le fait découvert par M. Œrsted n’est plus qu’un cas particulier ; tout dérive d’un fait plus général, qui est l’action