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niers temps, tourné les études vers les ouvrages de Platon, la partie socratique de ces ouvrages éveilla dans les esprits une sincère et vive sympathie. La philosophie de Socrate porte l’ame vers tout ce qui est bien et tout ce qui est beau, et en même temps elle n’a pas, ou plutôt elle ne paraît pas avoir un caractère très systématique ; par ce double motif, elle convenait merveilleusement à la nature hollandaise, et elle devait être pour elle l’idéal de la philosophie humaine. De là Hemsterhuis, que ses compatriotes ont appelé le Socrate de la Hollande. M. Van Heusde est l’Hemsterhuis de notre âge. Il est tout-à-fait de la même famille. Il vient de publier un ouvrage sur l’école socratique en langue hollandaise. Deux volumes ont paru ; je désirerais vivement les connaître ; l’Allemagne, qui traduit tout, jusqu’à mes écrits, devrait bien traduire ceux-là. M. Van Heusde se propose de donner bientôt un troisième volume, où il s’expliquera nettement sur les principaux problèmes de métaphysique. Il m’a dit que de ses longues études platoniciennes il avait recueilli une foule de notes de toute espèce, philologiques, comme celles du Specimen criticum, surtout historiques, où il a essayé à son tour de fixer la date approximative de la composition de chaque dialogue. Un jour il arrangera toutes ces notes, et il en fera un ouvrage spécial.

Nous avons beaucoup parlé de Schleiermacher ; nous le connaissons bien tous les deux. J’ai dit très franchement à M. Van Heusde que je regardais la traduction de Schleiermacher comme le plus grand travail du xixe siècle sur Platon, et l’auteur des Initia est lui-même de cet avis.

J’ai passé avec M. Van Heusde, à causer avec abandon de toutes choses, des momens qui me laisseront à jamais un doux souvenir. Quand je n’aurais connu que deux hommes en Hollande, M. de Falke et M. Van Heusde, je ne regretterais pas ce voyage. L’un m’a fait comprendre l’esprit hollandais en politique, l’autre ce qu’est et peut être la philosophie en Hollande.

Pour M. Van Heusde le point fondamental en philosophie, c’est la méthode. La vraie méthode, c’est l’observation, l’expérience, l’étude de la nature humaine en soi-même et dans les autres, mais surtout en soi-même, le γνώθι σεαύτον de Socrate et de Platon. On peut juger si j’applaudissais à une telle profession de foi.

Mais parce qu’on débute par l’observation, on n’est pas con-