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avec une indépendance dont on ne peut leur contester le droit, et qui ne s’assied pas moins près d’eux dans le conseil de l’instruction publique, avait imaginé ce jour-là de fermer la bouche à l’intendant-général de la liste civile, et de le réduire au silence sous peine de démission ! Je ne sais ce qui s’ensuivit, mais vous conviendrez que cette démarche témoigne moins de l’énergie de M. Guizot que de la vigilance qu’il exerce autour du ministère de l’intérieur, et de l’inquiétude un peu puérile que lui causent ceux qui pourraient y aspirer.

Quant aux affaires étrangères, vous savez déjà que M. Guizot n’a pas d’opinion. Je suis tenté de croire que M. Molé en a une, car un article du Journal des Débats, qui a paru ce matin, et qui donne gain de cause à la Russie dans l’affaire du Vixen, indique, je crois, la ligne que va suivre le président du conseil dans cette discussion. Le journal qui exprime cette opinion, et qui ne gâte pas d’ordinaire la Russie, reconnaît qu’elle pouvait faire respecter le blocus de la côte d’Abasie, et qu’elle est dans son droit. Que le traité d’Unkiar-Skelessi ait donné ou n’ait pas donné à la Russie une côte et un pays qui n’appartenaient pas à la Porte ottomane, l’usage autorise le blocus. La France, qui bloque les côtes d’Afrique ; l’Angleterre, qui bloque les côtes d’Espagne, savent cela mieux que personne. C’est là le jugement que prononce le Journal des Débats, et assurément on aurait mauvaise grâce à récuser ce juge, qu’on ne peut taxer de partialité envers ceux en faveur de qui il décide le procès.

Cette décision du Journal des Débats, qu’on peut bien croire dictée par le ministère, tient, je pense, à deux motifs. Si l’on avait blâmé la capture du Vixen, et si l’Angleterre avait pris au vif cette affaire, on ne pouvait faire moins que d’offrir sa médiation, et de s’interposer entre les deux puissances pour le maintien de la paix. Or, la Russie a déjà notifié au gouvernement français qu’elle n’acceptera aucune médiation, et dès à présent, quelques suites qui puissent en résulter, elle déclare vouloir traiter directement cette difficulté avec le gouvernement anglais. La médiation se trouvant ainsi impossible, il eût fallu appuyer lord Palmerston, et le suivre dans toutes les conséquences de son mécontentement, ou l’abandonner d’avance, et c’est ce qu’on a fait. C’est en même temps tirer vengeance de l’omission que lord Palmers-