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LES ORANGS.

ces particularités d’un de nos principaux marchands français qui a demeuré quelque temps en cette île. Cependant, je ne crois pas qu’on doive aisément ajouter foi à ces sortes de relations : il ne faut pas aussi les rejeter entièrement, mais attendre que le témoignage uniforme de plusieurs voyageurs nous éclaircisse plus particulièrement de cette vérité.

« Pour moi, ajoute le jésuite, en passant de la Chine à la côte de Coromandel, je vis dans le détroit de Malaque une espèce de singe qui me rendrait assez croyable ce que je viens de raconter de l’homme sauvage.

« Celui-là marche naturellement sur ses deux pieds de derrière qu’il plie, tant soit peu, comme un chien à qui on a appris à danser. Il se sert comme nous de ses deux bras ; son visage est presque aussi formé que celui des sauvages du cap de Bonne-Espérance ; mais le corps est tout couvert d’une laine blanche, noire ou grise ; du reste, il a le cri parfaitement semblable à celui d’un enfant, toute l’action extérieure si humaine et les passions si vives et si marquées, que les muets ne peuvent guère mieux exprimer leurs sentimens et leurs volontés. Ils paraissent surtout d’un naturel fort tendre, et pour témoigner leur affection aux personnes qu’ils connaissent et qu’ils aiment, ils les embrassent et les baisent avec des transports qui surprennent. Ils ont encore un mouvement qui ne se trouve en aucune bête, et qui est fort propre aux enfans, c’est de trépigner de joie ou de dépit quand on leur donne ou qu’on leur refuse ce qu’ils souhaitent avec beaucoup de passion… »

Je supprime le reste du passage, qui n’a rapport qu’à l’agilité de l’animal, et je reviens aux observations de Tyson.

Les renseignemens qu’il nous a donnés sur les habitudes du pygmée se trouvent épars dans tout l’ouvrage ; ils sont d’ailleurs assez peu nombreux ; l’animal, ainsi que je l’ai dit, était mort presque en arrivant en Angleterre, et il avait été souffrant pendant toute la traversée.

M. de Caen, qui en 1808 amena, de l’île de France à Paris, un jeune orang-outang, remarqua que, plusieurs jours encore après son embarquement, le roulis du navire l’inquiétait et lui ôtait une grande partie de la liberté de ses mouvemens. Il en fut de même, à ce qu’il paraît, pour le pygmée, et une bourrasque étant survenue lorsqu’il n’avait pas encore le pied marin, il fut jeté violemment