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Nouvelle-Orléans, pour s’y emplir, sans tour de faveur, de balles de coton. Aujourd’hui on a considérablement réduit ces délais insupportables ; et cependant, pour venir des mines d’Anzin à la fabrique de glaces de Saint-Gobain, c’est-à-dire pour faire un voyage qu’un piéton accomplirait sans effort en deux journées, des bateaux de charbon que l’on m’a cités, ont mis, en 1837, plus de 20 jours. Mais on n’est en droit de rien conclure de là contre les canaux en général. Ce sont des faits déplorables, qui prouvent seulement que si, en France, nous nous sommes formés dans l’art de construire des canaux, nous sommes encore bien novices dans l’art de nous en servir. Chez d’autres peuples, la circulation des marchandises sur les canaux est beaucoup plus rapide. Aux États-Unis, sur le grand canal Érié, qui rattache New-York au réseau des lacs de l’Amérique du Nord, les bateaux accélérés qui marchent jour et nuit franchissent les 146 lieues qui séparent les deux extrémités de ce beau canal, en sept fois 24 heures régulièrement, ce qui suppose une vitesse moyenne de 24 lieues par jour. Rien n’est plus commun qu’une vitesse pareille sur les canaux d’Angleterre ou d’Amérique. Les autres bateaux du canal Érié, qui s’arrêtent la nuit, ne restent que 13 à 14 jours en route ; ce qui suppose un parcours moyen de 10 à 12 lieues par jour. Les bateaux qui conduisent à Philadelphie les charbons de Schuylkill marchent du même train.

En France même, sur quelques canaux qui n’appartiennent pas à l’état et ne sont pas administrés par lui, il existe actuellement un service d’une promptitude remarquable et d’une régularité parfaite : je veux parler du canal du Midi et de quelques canaux attenans, où une administration éclairée a organisé, depuis 1834, une ligne de bateaux accélérés dont le commerce s’applaudit tous les jours davantage, et les compagnies propriétaires plus encore. Ces bateaux franchissent le canal du Midi, le canal des Étangs et le canal de Beaucaire, formant ensemble 90 lieues, en 6 jours et 16 heures, qui se réduisent à 118 heures de marche effective, y compris même le temps des stations pour chargement et déchargement des marchandises, parce que les bateaux s’arrêtent de 9 heures du soir à 4 heures du matin. Leur vitesse de déplacement, proprement dite, est de 6,000 mètres (une lieue et demie de poste) à l’heure. Les bateaux ordinaires peuvent faire le trajet de Toulouse au port de Cette en 6 jours, à raison de 10 à 12 lieues par jour. Mais comme il est d’usage qu’ils s’arrêtent pour déposer ou compléter leur chargement, leur traversée dure habituellement une quinzaine de jours. C’est un peu long comparative-