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s’efforce de maintenir l’intégrité de la souveraineté royale, qui disparaît pourtant, puisqu’une puissance nouvelle est destinée à la primer. Pendant qu’on proclame l’indépendance des divers états confédérés, on voit la diète s’arroger non plus seulement une haute tutelle politique, mais une sorte de suprématie administrative et financière, du moment où elle décide en dernier résultat, par l’intermédiaire du tribunal arbitral, du sort des projets de loi et du vote des budgets annuels.

Ce n’est pas que les dispositions de 1834 ne soient assez vagues pour admettre les interprétations les moins concordantes, et c’est en les présentant sous leur côté le plus libéral que les gouvernemens parvinrent à les faire accepter de l’opinion sans trop de résistance. Dans ces essais de conciliation entre deux doctrines opposées, dans cette constante tendance vers l’unité nationale de la patrie allemande, on sent des germes nombreux, qui ne peuvent manquer d’éclore dans l’avenir, en même temps que l’on touche au doigt toutes les faiblesses d’une situation transitoire. Si l’on avait jamais douté des destinées nouvelles de l’Allemagne, si l’on n’avait pas déjà pénétré toutes les facilités que rencontrerait une influence étrangère dans le chaos de ces principes hostiles et de ces intérêts divisés, pourvu qu’elle ne se produisît pas sous des dehors hostiles à l’indépendance germanique, les décrets de Francfort le révèleraient à coup sûr jusqu’à l’évidence ; ou je me trompe, ou les résolutions fédérales en disent plus sur le présent et l’avenir que les fêtes même de Hambach.

Maintenant que nous connaissons l’ensemble de ces mesures, rappelons sommairement les résistances qu’elles ont soulevées, et recherchons en quoi celles-ci ont dû rester inefficaces.

Après le mouvement démocratique et révolutionnaire de la fin de 1830 aux premiers mois de 1832, on voit éclater un mouvement constitutionnel sur le caractère légal duquel l’opinion sembla rester incertaine, à raison de cette simultanéité même. Quelque succincte analyse que nous présentions de cette crise parlementaire, elle suffira pour révéler tout ce qu’il y a dans ce pays d’étincelles de vie politique. On verra si l’Allemagne méridionale n’incline pas de toute sa puissance intellectuelle vers les idées françaises, et l’on verra jusqu’à quel point peut être fondée la singulière espérance de la voir accepter jamais le patronage du cabinet de Saint-Pétersbourg pour protéger son unité naissante contre les influences rivales de Berlin et de Vienne[1].

Avant la publication des décrets de Francfort, la Bavière avait assisté à une grande lutte politique où elle avait comme épuisé ses forces. Le retrait des ordonnances de censure, la sortie du ministère de M. de Shenck, qui les avait contresignées, furent un éclatant mais dernier hommage payé aux

  1. Dépêche d’un agent diplomatique russe en Allemagne sur l’état et l’avenir de la confédération germanique. (Portofolio, no 2).

    Nous attachons peu d’importance à la valeur politique de ce recueil. Si l’on cite ici l’une des pièces originales qui y sont contenues, c’est qu’elle a tous les caractères de l’authenticité.