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DE L’ALLEMAGNE.

n’allait à rien moins qu’à autoriser, en matière de mariage mixte, précisément ce que Rome persistait à refuser de la manière la plus formelle.

Lorsque le siége de Cologne devint vacant, le premier soin du ministre des cultes fut de réclamer du baron de Droste, que le roi venait d’y élever, l’exécution de la convention passée avec son prédécesseur en conformité, disait-on, du bref de Pie VIII.

Les difficultés déjà si graves de sa situation étaient encore augmentées pour le nouvel archevêque, par l’usage ou l’abus qu’on prétendait faire contre lui d’une adhésion qu’il aurait donnée à cette convention, comme condition de son élévation au siége de Cologne. M. de Droste, en effet, informé de l’existence d’un acte secret conclu conformément au bref du pape, avait déclaré apprendre avec joie l’existence d’un tel accord, et s’était engagé à l’exécuter, dans l’esprit de paix où il avait été conçu[1].

De cette promesse donnée en termes généraux avant sa nomination, le cabinet de Berlin paraît induire que l’archevêque connaissait la substance même de la convention secrète, alors que celui-ci, sur son honneur d’homme et sa conscience de prêtre, atteste qu’il croyait, en 1835, adhérer à un acte conforme, et non pas diamétralement contraire aux prescriptions pontificales.

Quoique cet incident ait compliqué l’affaire si parfaitement simple de Cologne, il ne touche pas, du reste, au fond même de la question. L’archevêque aurait eu le tort grave d’adhérer à des dispositions contre lesquelles le soin de ses devoirs l’aurait excité plus tard à revenir, que cette faiblesse ne lui créerait pas une situation plus fausse assurément que celle d’un agent diplomatique, amené, par les difficultés de son rôle, à nier en avril 1836, dans une note officielle, l’existence d’une convention signée par lui-même en juin 1834[2] !

On sait les mesures auxquelles s’est trouvé entraîné un cabinet dont la prudence et la modération ont fondé le crédit en Allemagne et en Europe ; tristes nécessités dont l’expérience de M. Ancillon aurait probablement détourné, quelles que fussent ses sympathies religieuses, et qui, commençant dans les provinces rhénanes, se produisent aujourd’hui à l’autre extrémité du royaume, au sein des catholiques provinces polonaises[3].

La Prusse s’est gratuitement engagée dans des voies incertaines et périlleuses. Si elle persiste dans l’exécution de l’ordonnance de 1825, près de la moitié de ses sujets se regarderont comme atteints à la source même de leur foi ; et la seule autorité religieuse qui soit aujourd’hui dans le monde, est venue sanctionner leurs plaintes et rompre un silence dont les pouvoirs politiques semblaient se croire assurés pour toujours. L’adhésion de la masse du clergé, dont les membres devançaient déjà le jugement de Rome au grand

  1. Exposé de la conduite du gouvernement prussien, etc., pag. 122.
  2. Note de M. Bunsen au cardinal Lambruschini. — Annexe no VI de la publication faite par la chancellerie romaine : Espositione di fatto documentata su quanto ha preceduto e seguito la deportazione di monsignor Droste, arcivescovo di Colonia. Roma. 1838.
  3. Lettre pastorale de l’archevêque de Gnesen et Posen, 17 février 1838.