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prise, il y a quelques jours, dans la chambre des pairs, un fort éloquent discours qui avait le grand tort de sembler fait bien plus pour le sénat de Bruxelles que pour la tribune du palais du Luxembourg.

Vous me demanderez maintenant, monsieur, en quoi les dispositions favorables de la France pour la Belgique serviront à Londres la cause belge, s’il est vrai, comme je le crains, que la question territoriale soit irrévocablement jugée ? Je l’ai indiqué plus haut et je vais vous développer ma pensée. Le traité des vingt-quatre articles contient des stipulations financières que la conférence de Londres avait trop légèrement arrêtées, qui, dans le principe, n’étaient pas entièrement justes, et dont le rigoureux accomplissement serait bien autrement injuste aujourd’hui. D’abord, le partage de la dette n’a pas été fait sur des documens d’une exactitude irréprochable, et la conférence de Londres paraît même s’en être défiée au moment où elle en faisait usage pour ses calculs. Effectivement, on a prouvé que les charges particulières de la Belgique, antérieurement à la réunion, avaient été exagérées dans le travail de la conférence, que sa part dans la dette commune avait été fixée, pour ainsi dire, arbitrairement, sans tenir compte de tout ce qu’elle aurait dû porter en déduction, et qu’enfin on lui avait imposé, pour des avantages problématiques dont elle ne se soucie pas ou qu’elle ne veut pas acheter aussi cher, une charge additionnelle qu’elle a certainement le droit de repousser. Vous avez eu raison, monsieur, d’insister spécialement, dans une autre partie de ce recueil, sur cette marine hollandaise, créée presque tout entière après 1815, avec de l’argent belge pour les trois quarts, et dont la Belgique n’a rien conservé. Je trouve un grand sens et une grande valeur à la statistique ainsi faite, et soyez persuadé que ces chiffres, donnés pour la première fois, ont produit ailleurs une forte impression. Voilà donc, monsieur, ce qui est à réformer dans le traité des vingt-quatre articles, à modifier essentiellement en faveur de la Belgique. Voilà sur quoi doivent se porter, dans le cours des négociations nouvelles qui vont s’ouvrir, les efforts de ses amis, parce que c’est sur ce chapitre de la dette qu’ils seront heureux, n’en doutez pas, si la Belgique ne commet point de fautes. Je me rappelle ici que dans le premier plan de traité entre la Belgique et la Hollande, les arrangemens territoriaux étaient seuls considérés comme fondamentaux et irrévocables, tandis que les arrangemens financiers étaient qualifiés de propositions. Je crois que la conférence de Londres pourrait en revenir là, et je vais vous dire deux raisons qui me feraient espérer le succès des démarches que l’on tenterait dans ce but.

Remarquez, en premier lieu, que ce n’est plus là une question de principes, de passions politiques, de système européen. On n’ébranle rien, on ne compromet rien, en réduisant la part de la Belgique, dans la dette commune, à 4 ou 5 millions de florins, au lieu de huit. Et si, comme j’en suis convaincu, ce résultat peut être atteint au moyen d’une révision rigoureuse de tous les élémens du compte, vous avouerez que cette circonstance fortifie