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plus neuf, c’est la peinture d’un rossignol apprivoisé donné par Alcon à Donace.

La onzième pièce de Calpurnius, Eros, est un carmen amæbeum où deux amans maltraités se plaignent, en couplets alternatifs, l’un des rigueurs de Meroe, l’autre d’un nouvel Alexis, Iolas. Les idées, les mouvemens, on pourrait presque dire les expressions, tout cela est pris des deux modèles habituels du poète, mais disposé avec art. Cette églogue est la plus correcte de toutes, la plus élégamment concise ; peut-être était-elle la dernière chronologiquement, comme dans l’ordre du recueil, et le talent de l’auteur était-il arrivé à sa maturité.

Nous n’avons rien dit de la sixième de ces pastorales, intitulée Litigium, c’est encore une dispute de bergers, comme chez Théocrite et Virgile. Toute la différence, c’est que, quand cette dispute va se terminer à l’ordinaire par la lutte musicale et poétique du poème amébéen, elle se renouvelle tout à coup et rend le combat impossible. Malgré la même adresse spirituelle à renouveler ces vieilles formes, cette pièce est peu agréable et regardée comme la moins bonne du recueil de Calpurnius. Le poète, innovant dans la fable, si on peut se servir de cette expression à propos d’églogue, retombe encore ici, lorsqu’il vient au détail, dans le lieu commun. Les injures des bergers, leurs provocations, le choix des enjeux et d’un endroit propre à la lutte, tout cela est plein de redites. L’un de ces bergers risque un cerf privé contre un jeune cheval ; la description des deux animaux est faite très complaisamment ; mais ce sont des centons de Virgile et d’Ovide. On se rappelle les charmantes descriptions du cerf privé de Sylvie et de Cyparisse : le cerf du berger Astylus n’est qu’un plagiat ; on peut dire la même chose du cheval de Lycidas, contre-épreuve du jeune étalon si bien peint dans les Géorgiques. La comparaison de ces morceaux conduirait encore à reconnaître la facilité verbeuse des paraphrases de Calpurnius. Il n’y a plus le choix sévère et discret, le talent de composition de Virgile ; il n’y a plus la poésie facile, mais caractéristique par les détails, qu’on retrouve dans Ovide. La description de la parure du cerf, par exemple, est infinie et étouffe le reste ; c’est comme cette Vénus qu’un peintre avait fait riche, ne la pouvant faire belle. On peut trouver que ces présens, ce cerf si bien, trop bien paré, et ce cheval de prix, excèdent un peu la fortune ordinaire des bergers. Je ne reprocherais pas, comme Wernsdorf, à Calpurnius d’avoir mis en scène de riches fermiers ; mais alors il les fallait faire un peu moins brutaux. C’est