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le lieu commun et le centon. Par un éclectisme naturel à cette époque, il emprunte, non seulement à l’auteur des Bucoliques, mais encore à Horace, à Properce, à Tibulle, à Ovide, à Stace, à Juvénal, à presque tous les poètes qui avaient écrit avant lui. Il y a chez Virgile un accent d’amour pour les choses de la campagne qui ramène à l’églogue ce qui paraît s’en écarter le plus. Ce principe d’unité manque à Calpurnius, qui décrit agréablement, mais plutôt d’après des souvenirs littéraires. Le caractère général de son style est une facilité élégante, mais prolixe, bien qu’il ne mérite pas, à cet égard, le dédain de Scaliger qui le trouve ennuyeux, ce qu’il n’est pas. Il a quelquefois des négligences, des répétitions, des duretés, des tours incorrects et un emploi de mots inusités et presque barbares, ce qui tranche avec la pureté générale de son style puisé aux meilleures sources. Ce ne peut être, dit Wernsdorf, ni ignorance, ni influence du mauvais langage de son temps, auquel il ne tenait qu’à lui d’échapper comme Claudien. Le savant critique arrive à y voir des grossièretés volontaires pour se rapprocher de la condition des personnages, et il cite, à cette occasion, le dorisme et l’abandon négligé de Théocrite, les rares archaïsmes et les taches plus rares encore de Virgile, qu’on a expliqués de même. Je trouve cette explication subtile, et j’aime mieux croire, en certains endroits, à l’altération du texte par la négligence ou l’ignorance des copistes.

Après Calpurnius, l’attrait d’un genre qu’on peut croire facile, l’usage reçu d’en faire une forme à tous sujets, multiplièrent ces sortes d’imitations. Faut-il comprendre cependant parmi les poètes bucoliques Citerius Sidonius de Syracuse, dont il nous reste une petite épigramme intitulée : Les trois Pasteurs ? Tout l’agrément de cette pièce consiste en ce que les trois bergers y sont continuellement rappelés ensemble avec des détails qui les distinguent, de sorte qu’il y est question à la fois de leurs trois familles, de leurs trois troupeaux, de leurs trois maîtresses ; toujours trois noms et trois circonstances qui les suivent invariablement. C’était là un de ces thèmes recherchés qu’on se proposait volontiers dans ces siècles de décadence où, faute de mérite plus littéraire, on estimait celui de la difficulté vaincue.

Si l’Eclogarium et les Idyllia d’Ausone n’ont rien de plus bucolique, on retrouve la pastorale chez un écrivain de race gauloise, allié de la famille de ce poète. La vingt-sixième lettre de saint Paulin, qui paraît lui être adressée, en parle comme d’un païen converti au christianisme, et le poème que nous avons de lui est probablement