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MÉTAPHYSIQUE ET LOGIQUE D’ARISTOTE.

Nous nous arrêterons quelque peu sur la troisième partie de l’Essai de M. Ravaisson ; c’était la plus difficile à traiter ; c’est aussi la meilleure. Je voudrais, en prenant pour guide le jeune philosophe, signaler quelques traits saillans du système d’Aristote. La science a comme la nature son commencement et sa fin, et l’on voit se répéter d’âge en âge la double hiérarchie de la nature et de la science entre leurs premiers principes et leurs fins dernières, qui reposent dans l’éternité. Toute existence réelle a quatre principes, la matière, la forme, la cause motrice, la cause finale. La science des premiers principes est la science de l’être en tant qu’être ; c’est la philosophie première.

Il ne faut pas comprendre dans l’être ce qui n’est que par accident. L’être n’est pas non plus le vrai, car le vrai et le faux n’existent que dans la synthèse de l’entendement.

Il y a dix genres entre lesquels se partagent, en définitive, tous les attributs que l’entendement peut affirmer d’un sujet ; ce sont les catégories ; nous les énumérerons plus loin, quand nous parlerons de la logique.

Toute science suppose trois élémens distinctifs : ce dont elle démontre, ce qu’elle démontre, et ce par quoi elle démontre, le sujet, l’attribut, l’axiome.

Le premier, l’unique objet de la science de l’être, est l’être proprement dit, la substance dont toutes les catégories ne sont que des accidens. L’être ne consiste ni dans les catégories ni dans les genres ; l’être, c’est l’individu.

L’individu est soumis à un changement continuel ; les individus changent, ils sont, mais aussi ils deviennent. En passant d’un état à un état contraire, l’être devient ce qu’il n’était pas, de la puissance il a passé à l’acte : le mouvement est donc la réalisation du possible.

La matière est un terme relatif qui suppose le corrélatif de la forme. La forme est l’être en soi. La matière répond à l’infini. Le mouvement n’a pas sa fin en soi-même ; il finit au repos. Mais le repos lui-même n’est pas la fin, car il n’est que la privation du mouvement ; la fin dernière est l’action.

Le théâtre du mouvement est l’espace : l’étendue est continue ; la continuité suppose l’indivisibilité à l’infini. L’infini n’existe jamais en acte : l’infinité ne consiste que dans la possibilité de passer d’une quantité à une autre. Le temps n’est pas le mouvement ; le mouvement est inégal, le temps est égal. Le temps suit le mouvement, comme le mouvement l’étendue. Le sujet du mouvement ou le mo-