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d’hui, on s’efforce de lui persuader que c’est le gouvernement qui lui a valu toutes ces attaques ; en déclarant qu’on ne l’avait pas autorisé à recevoir le présent qu’il a refusé, c’est évidemment le cabinet qui l’offense, et l’opposition qui le défend. La conséquence est facile à tirer. Le général Bugeaud n’aurait rien de mieux à faire qu’à se jeter dans ses rangs, et à combattre le gouvernement qu’il soutient depuis huit ans de tout son courage civil et militaire. L’opposition prouvera bien vite alors que le général Bugeaud a des idées plus exactes, en fait de principes constitutionnels, qu’elle n’avait pensé d’abord ; et qui sait si, à son avénement aux affaires, elle ne lui votera pas, pour les chemins vicinaux de son département, les 100,000 francs qu’elle lui reprochait si violemment, il y a peu de jours ?

Sérieusement, c’est un spectacle instructif que celui-ci. Il fallait absolument un coupable, et plus il eût été élevé, plus la victoire eût été grande. Après l’avoir cherché dans l’armée, dans le ministère, et même plus haut, voyant que cette affaire de Perpignan est encore une affaire manquée pour elle, l’opposition se retranche dans une prétention plus modeste. Elle veut à toute force séparer du gouvernement un général qui lui a rendu de grands services, et qui a combattu les partis avec une énergie dont ils portent encore les marques. De bonne foi, est-ce là que le général Bugeaud irait aujourd’hui prendre des conseils ? Il n’y a pas de milieu, disent les organes de la coalition, le général a calomnié le ministère, ou le ministère a calomnié le général. Il y a un milieu cependant, ne leur en déplaise ; et entre les paroles de M. Bugeaud, qui a déclaré qu’il avait demandé l’autorisation d’accepter le don d’Abd-el-Kader, et M. Molé qui déclare qu’il l’a refusée, d’accord avec le conseil, après avoir promis de le consulter, se place une vérité : c’est que le ministre et le général ont été de bonne foi, et que ni l’un ni l’autre ne se sont écartés, dans leur conduite, de la ligne des principes constitutionnels. Quant aux paroles que voudrait travestir la coalition, elles sont sans importance en présence des faits, et les faits répondent à tout. Ces faits seront portés à la tribune, et nous verrons si là les attaques de la presse, ou celles dont M. Duvergier de Hauranne menace le ministère, seront mieux venues que dans la dernière session.

Après quelques délibérations, la décision de la diète helvétique sur la demande d’expulsion de M. Louis Bonaparte, a été ajournée au 1er  octobre. La diète avait chargé une commission de rédiger un préavis dans cette affaire. La commission, se trouvant scindée en une majorité et deux minorités, a présenté trois conclusum différens. Celui de la majorité, où figurent M. Burckhardt et d’autres, consiste à inviter le gouvernement de Thurgovie à exiger de M. Louis Bonaparte une déclaration simple et précise qu’il renonce sans réserve à sa qualité de Français et à toute prétention ultérieure à cette qualité. À cet article, M. Burckhardt a ajouté que M. Louis Bonaparte serait sommé de n’entreprendre, de ne favoriser de son nom ou de sa participation aucuns actes qui auraient pour but, soit de l’appeler au trône de France, soit de troubler la tranquillité de ce royaume. Nous ne parlerons pas des rapports