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vation, la méthode expérimentale, et, par suite, l’arithmétique et la géométrie, étaient cultivées dans le sud de l’Italie. Les recherches des pythagoriciens sur les vibrations des corps sont les plus anciennes expériences de physique qui soient parvenues jusqu’à nous, et les premières notions sur la nature du soleil, sur la sphéricité et la rotation de la terre, sont siciliennes. Au reste, c’était l’enfance de la science ; les pythagoriciens se formaient de bizarres idées sur certains points : ainsi, Philolaüs croyait à un soleil de verre, le grand citoyen Empédoclès à deux soleils. Archytas, le maître de Platon, le célèbre général, avait, il est vrai, commencé à appliquer la géométrie à la mécanique, et essayé le premier de résoudre le problème de la duplicité du cube ; mais les conquêtes des Romains, plus occupés de guerres que de sciences, arrêtèrent ces progrès. Archimède, dont Leibnitz disait : « Ceux qui sont en état de le comprendre, admirent moins les découvertes des plus grands hommes modernes ; » Archimède, né l’an 467 de Rome, fut tué, malgré Marcellus, par un soldat de la ville éternelle, comme si le génie de la science n’avait pu s’accorder avec le génie des conquêtes. Ce savant était arrivé à mesurer les espaces curvilignes dans la quadrature de la parabole et à préparer le calcul des limites, qui prépara à son tour l’analyse moderne. Le rapport entre la sphère et le cylindre, la difficile et ardue synthèse du traité des spirales, l’invention des centres de gravité, d’où dépend la statique, doivent aussi se rapporter à lui. Mais ses machines, sa défense de Syracuse et sa mort rendirent surtout populaire ce grand géomètre, qui paya aussi son tribut à la tyrannie, puisque (et on n’a jamais relevé ce fait) il construisit, selon Athénée, un vaisseau destiné aux plaisirs honteux d’Hiéron.

Mais Rome soumettait le monde à un empire, et négligeait toujours les sciences ; on est étonné d’apprendre que le nom des heures ne fut introduit, dans la ville du peuple-roi, qu’après la loi des douze tables. Les mathématiques étaient si peu avancées, que les jurisconsultes commettaient une erreur sur la surface du triangle équilatéral, et que Sulpicius Gallus, prédisant les éclipses, était regardé comme un prodigieux savant. On ne trouve guère d’autre trace de la culture de la physique chez les Latins, que certains vers de Lucrèce, entre autres ce remarquable passage sur la chute des graves :

Nullam rem posse sua vi
Corpoream sursum ferri, sursumque meare
.

Plus tard, César écrivit un livre sur l’astronomie et réforma le calendrier, et les sciences firent quelque progrès sous Auguste. Mais l’esprit de Rome n’était pas scientifique. On ne connut bientôt d’autres mathématiciens que les astrologues, tour à tour chassés et rappelés par la superstition des empereurs. Les Questions naturelles de Sénèque, et l’Histoire naturelle de Pline, fournissent pourtant quelques notions curieuses à M. Libri sur l’état des connaissances des Romains. On y trouve trace d’observations attribuées vulgairement à des savans modernes, ainsi le développement de l’électricité par