Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 18.djvu/353

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
349
ILLUSTRATIONS SCIENTIFIQUES.

Mais il est temps que nous arrivions à l’exposé de la doctrine que Broussais a substituée à celle qu’il a cru renverser, et que nous disions maintenant ce qu’est la médecine physiologique, cette médecine qui a eu un si grand retentissement, qui a envoyé des adeptes dans toutes les parties du monde, et au nom de laquelle il s’est versé et il se verse encore tant de flots de sang.

Le premier ouvrage où M. Broussais déposa le germe des idées qu’il développa plus tard, est son Histoire des Phlegmasies ou inflammations chroniques. Cette histoire n’était qu’une application des idées de Bichat à l’anatomie pathologique et à la clinique ; ce n’était que la continuation de ce que Pinel avait fait dans sa Nosographie philosophique. Bichat, dans son Anatomie générale, avait étudié séparément les divers tissus qui composent la structure organique de l’homme, et avait déterminé quels étaient les caractères anatomiques et physiologiques généraux de ces tissus appartenant à des organes différens ainsi le tissu cellulaire, le tissu muqueux, le tissu osseux, etc. De plus, il avait cherché à déterminer quelles sympathies liaient entre eux les différens tissus. Bien qu’il soit reconnu à présent que la gloire de Bichat ait été portée trop haut par ses contemporains, il est impossible de ne pas reconnaître dans ce célèbre physiologiste les vues de détail les plus ingénieuses, l’imagination scientifique la plus belle, et le style le plus attrayant. Si l’on considère que Bichat avait peu d’instruction et est mort à trente-deux ans, on reconnaîtra en lui un des plus merveilleux talens qu’aient produits la science et notre pays ; quant à la portée de ses idées médicales, le temps démontrera de plus en plus qu’elle a été fort exagérée.

L’Histoire des Phlegmasies chroniques était donc la continuation de Bichat. M. Broussais faisait pour la pathologie ce que Bichat avait fait pour l’anatomie et la physiologie. Il faisait connaître les caractères de l’inflammation dans les différens tissus de l’organisme, caractères anatomiques et caractères physiologiques. L’auteur en tirait déjà des conclusions, et faisait pressentir un système d’idées tout nouveau. Ces conclusions étaient :

1o Que sur un grand nombre de malades morts d’affections réputées générales, et appelées fièvres, on trouvait des traces d’inflammation dans plusieurs organes ;

2o Que très souvent ces inflammations s’observaient dans les organes digestifs et leurs dépendances ;

3o Que le traitement tonique et excitant, généralement opposé à ces fièvres, leur était essentiellement contraire et devait être rem-